Toute l’actualité Lyon Entreprises

Atari ne joue plus : l’inexorable glissade de l’ex-Infogrames continue

Inexorablement, la société créée par Bruno Bonnell sous le nom d’Infogrames qui a changé de dénomination lors de son rachat par des fonds anglo-saxons, poursuit sa chute. L’un des actionnaires, BlueBay n’y croit plus et ne va même pas accompagner l’augmentation de capital qui vient d’être annoncée, afin de restructurer la dette. L’action vaut désormais moins d’un euro, tandis que quinze plaintes ont été déposées par de petits actionnaires.

Une fois de plus Atari va faire appel au marché pour tenter d’assurer sa pérennité et rembourser à son principal actionnaire une partie des fonds qu’il a engagés.

Il s’agit en fait d’une véritable restructuration financière. Elle prend la forme d’une augmentation de capital de 20 millions d’euros, dont 10 seront utilisés pour rembourser le fonds BlueBay, qui détient 29,2% du capital.

Une seconde levée de fonds de 10 millions d’euros sera réservée à des investisseurs financiers, dont l’identité n’a pas été révélée dans la mesure où leur liste n’a pas été arrêtée.

Le vœu de la direction d’Atari est de terminer cette restructuration financière avant la fin de l’année.

Quinze plaintes de petits actionnaires

Pour ce faire, il va lui falloir obtenir le feu vert de ses actionnaires réunis lors de l’assemblée générale extraordinaire d’ici au 30 novembre. Et cela pourrait tanguer quelque peu : deux nouvelles plaintes pour délits d’abus sociaux ont été déposés au Tribunal de Grande Instance de Paris par le cabinet d’avocats Amblard à l’encontre des dirigeants d’Atari. Ce qui porte le nombre de plaintes des petits actionnaires qui s’estiment spoliés, à quinze !

Sont visées l’importance des rémunérations et jetons de présence de Franck Dangeard, président non exécutif d’Atari et Jim Wilson, directeur général et mandataire social.

Ces derniers épisodes en date de la société de jeux vidéos d’origine lyonnaise, illustrent la poursuite de la glissade d’une entreprise qui fut sous l’ère de son créateur, Bruno Bonnell, sous le nom d’Infogrames, l’un des fleurons du secteur. Créateur de Robopolis et désormais leader de la robotique en France, Bruno Bonnell a su rebondir, pas Atari.

En cette année 2012 où l’ex-Infogrames fête ses quarante années d’existence, sa capitalisation a chuté à l’un des plus faibles niveaux de son histoire : 27 millions d’euros.

Quelques chiffres illustrent cette chute inexorable : à l’occasion de son exercice 2001/2002, Infogrames publiait un chiffre d’affaires de 769 millions d’euros. La société comptait alors 2 300 salariés dans le monde.

En mars 2012, la société a publié un chiffre d’affaires de…39,6 millions d’euros pour une perte (part du groupe) de 3,7 millions, il est vrai avec un résultat opérationnel de 1,7 million d’euros. Ses effectifs ont fondu au même rythme. Au cours de l’année écoulée, ceux-ci sont passés, au gré des changements de périmètre, de 147 personnes à… 51.

En fait, depuis le départ de Bruno Bonnell en 2007, la société dont le siège social est désormais basé à Paris, a subi une véritable valse de ses dirigeants, ce qui n’a pas favorisé la continuité stratégique. Patrick Leleu, David Gardner, Phil Harrison, Jeff Lapin, jusqu’au responsable actuel, Franck Dangeard, un ancien Pdg de Thomson, devenu président non exécutif en 2009 et Jim Wilson, l’actuel directeur général, se sont succédés à la tête de l’entreprise…

Ces dirigeants successifs ont multiplié les erreurs stratégiques. Ainsi, en 2008, Atari semblait avoir fait une belle opération en rachetant Cryptic Studio, « le » spécialiste mondial de la nouvelle et forte tendance des jeux vidéos : ceux, multijoueurs, sur ordinateurs qui a fait la fortune de Blizzard, la très rentable filiale de Vivendi. Mais elle a été revendue en 2011 au Chinois Perfect World.

La dernière pépite, Eden Games, vendue en mai

En mai dernier, Atari annonçait la vente de son dernier studio en propre, Eden Games, basé à Lyon. Désormais le groupe n’a plus les capacités de développer ses propres jeux. Il n’est plus que distributeur.

La dernière restructuration en date vise à assainir une nouvelle fois le bilan, en permettant à Atari de réduire ses engagements financiers. Malgré la faiblesse du montant de l’augmentation de capital, BlueBay, son principal actionnaire ne suit plus et se laisse diluer. A l’issue de l’opération, il ne détiendra plus que 14 % de la société. Il semble lui-même ne plus y croire.

Ce n’est pas, bien sûr, la vision de l’actuelle direction d’Atari qui estime, elle, que l’opération va lui conférer « un actionnariat plus équilibré, un bilan plus sain et une structure financière simplifiée. »

Elle ajoute dans le communiqué annonçant la restructuration financière que « ce plan s`inscrit dans la ligne des rigoureuses restructurations opérationnelles d`Atari et de sa nouvelle stratégie visant à se concentrer sur les jeux digitaux et les licences », en rappelant qu’après des années de pertes « conséquentes », la société « est à nouveau rentable grâce à sa réorientation vers les jeux digitaux, les revenus provenant des licences et une stricte politique de gestion des coûts ».

Cette même direction confirme enfin son évolution vers les jeux mobiles avec la sortie, annonce-t-elle, de quatre à six nouveaux titres dans les six prochains mois.

A l’annonce de cette restructuration, l’action Atari a plongé de 16,81%. Elle est désormais passée sous la barre du simple euro, perdant 40 % de sa valeur en six mois. Echaudés par une stratégie en zigzag, les petits actionnaires, eux, n’y croient plus du tout.