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Grotte Chauvet en Ardèche : un espace de restitution en or

La restitution, c’est-à-dire la reconstitution quasiment parfaite au moindre détail près grâce à l’informatique de la fameuse grotte Chauvet ardéchoise, est lancée. Son coût devrait avoisiner les 50 millions d’euros auxquels il faudra ajouter 30 autres millions pour obtenir le label Unesco et créer des infrastructures pour attirer des touristes espérés à plus haut pouvoir d’achat, en sus de la clientèle traditionnelle fréquentant l’Ardèche méridionale. Un Chauvet 3 pourrait aussi voir le jour.

L’argent actuellement est rare et cher. Sauf, apparemment pour l’espace de restitution de la grotte Chauvet, en Ardèche. Les travaux viennent d’être lancés. Ministre de la culture, Aurélie Filippetti a fait le déplacement, non pas pour poser la première pierre, mais la première main, à l’image des nombreux dessins qui ornent cette caverne vieille de 36 000 ans, sur le futur espace de restitution, Chauvet 2.

Un geste qui a un coût élevé : 50 millions d’euros pour dupliquer la grotte, auxquels il faut rajouter près de 30 millions, si l’on prend en compte les investissements destinés à accompagner économiquement cette future grotte n°2 qui a l’ambition d’être la locomotive touristique de l’Ardèche méridionale et l’inscrire dans une myriade d’autres projets.

Un chiffre qui apparaît important pour reconstituer une simple grotte, mais les porteurs du projet ont vu grand : on n’y trouvera pas qu’une grotte Chauvet bis sur le site boisé de 29 hectares situés sur les hauteurs de Vallon Pont d’Arc.

On y découvrira, outre la grotte restituée sur 3 000 m2 (mais 8 500 m2 de surfaces développées au sol, parois et plafonds), un centre de découverte de 1 385 m2, un espace pédagogique de 500 m2, encore un autre pôle, d’exposition temporaire de 500 m2, cette fois, un autre bâtiment dédié à événementiel de 5 000 m2 et enfin un grand espace doté d’un restaurant et de boutiques de 1 700 m2.

Cet futur lieu touristique ne veut pas abimer le paysage et se fera donc le plus discret possible, en épousant la topographie du lieu. C’est une équipe d’architectes de Clermont-Ferrand (Fabre/Speller), associée à l’ Ardéchois « Atelier 3A» et à l’agence parisienne « Scène » qui a emporté l’appel d’offres.

Le site sera géré par Kleber Rossillon, associé à Sodexo

La société Kleber Rossillon qui, associée à Sodexo qui gérera cet espace dans le cadre d’une délégation de service public sous la forme d’un contrat d’affermage sur vingt ans, a aussi mis au pot : 2,8 millions d’euros.

Le chantier est prévu pour durer deux ans et demi : il devrait être inauguré à la fin de l’année 2014.

Malgré le coût élevé du projet, ses promoteurs ont réussi à décrocher outre, bien sûr la participation des collectivités locales ardéchoises et de la Région Rhône-Alpes, des financements européens pour 6 millions d’euros et de l’Etat pour 10 autres millions.

Cette sollicitude financière s’explique selon Hervé Saulignac, 1er vice-président du Conseil général d’Ardèche chargé des grands projets, par le parti pris choisi : « En aucun cas, nous n’avons voulu créer un nouveau parc d’attraction. Il s’agissait pour nous de développer un lieu culturel largement ouvert. » Et d’ajouter : « La Région Rhône-Alpes a d’ailleurs beaucoup insisté pour que l’ambition première de ce site soit avant tout culturelle. »

Tirer le tourisme par le haut

Derrière cette volonté affichée se trouve aussi une stratégie économique. Le tourisme de l’Ardèche méridionale est essentiellement un tourisme d’hôtellerie de plein air. Il n’existe même pas d’hôtels susceptibles d’accueillir du public en nombre à Vallon Pont d’Arc.

« Nous espérons-poursuit Hervé Saulignac-que ce futur site drainera aussi une nouvelle clientèle à plus haut pouvoir d’achat que celle fréquentant habituellement nos sites. »

La fréquentation attendue du futur site est estimée à 350 000 visiteurs. Près de 60 % d’entre eux devrait être constitués par des touristes fréquentant déjà l’Ardèche méridionale. Reste désormais à attirer les 40 % restants, qui feraient le détour de l’autoroute A 7.

Un autre argument devrait jouer en faveur de cette stratégie de montée en gamme : un label très convoité. L’Etat français déposera en janvier 2013, la candidature au classement au patrimoine mondial de l’Unesco de la grotte Chauvet. Avec l’espoir d’une réponse positive qui est attendue à l’été 2014. Quelques mois avant la date espérée de l’inauguration…

Mais là encore, cette candidature va coûter de l’argent. Les dossiers pour obtenir ce label sont devenus très lourds : il faut présenter un plan de gestion à quinze ans, « il faut aussi réhabiliter tous les alentours du site », décrit le premier vice-président du conseil général ardèchois.

Trente-sept autres sites ardéchois concernés !

Tout ceci a un coût qui rajoute une trentaine de millions d’euros à l’enveloppe financière dont dix millions déboursés par la Région Rhône-Alpes. Outre les travaux d’embellissement d’un large périmètre du site, figurent aussi des aides destinés à renforcer le potentiel de sites touristiques déjà existants, présents en Ardèche méridionale, qui craignent de disparaître dans l’ombre de la future grotte 2. Pour que cette dernière fasse office de locomotive touristique, pas moins de trente-sept autres équipements et sites touristiques feront l’objet d’aménagements ou d’investissements : avec la création, par exemple d’un musée sur le site de fouilles, proche, d’Alba-la-Romaine !

Un plan de développement des transports collectifs sera également mise en place.

Enfin, cet argent devrait être aussi utilisé pour développer des activités économiques, notamment autour de la 3D. Un Chauvet 3 entièrement numérique et pouvant voyager à travers le monde pourrait être ainsi élaboré.

Il s’appuierait sur la technologie 3D révolutionnaire, mise au point par le géomètre Guy Perazio qui va permettre la création de Chauvet 2. A l’aide d’un scanner haute précision, un modèle numérique en trois dimensions de la cavité a été réalisé. L’enregistrement de plusieurs millions de points a permis de reproduire une surface continue correspondant à la volumétrie originale. Six mille photos numériques des fresques ont ensuite été réalisées et superposées à la « peau informatique », permettant de recréer numériquement la grotte à l’échelle 1.

Ces 80 millions devraient à terme créer cinquante emplois directs « et plusieurs centaines d’emplois indirects », expliquent les promoteurs de l’opération. D’aucuns pourraient trouver le rapport entre l’investissement et les emplois créés particulièrement faible. Ils n’ont pas tort. Sauf si ce futur site touristique développe suffisamment de synergies pour tirer vers le haut l’un des départements les plus touchés par le chômage en Rhône-Alpes.

Photo (DR)L’espace de restitution Chauvet 2.