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Une filière sous pression : Rhône-Alpes entend investir 4 millions d’euros par an dans les méthaniseurs

L’objectif est de créer d’ici 2020, 800 installations de méthanisation en Rhône-Alpes. On en est loin : 46 équipements existent seulement aujourd’hui. La France a pris énormément de retard dans ce domaine, par rapport, notamment, à l’Allemgne. Les quatre principaux acteurs qui ont signé à Eurexpo, lors du salon Be+, une « Charte de la méthanisation » entendent accélérer le mouvement.

Beaucoup d’articles paraissent actuellement mettant en évidence les difficultés rencontrées par la méthanisation en France et notamment celles concernant les « méthaniseurs agricoles », ceux censés tirer ce nouveau marché et développer une véritable filière.

 Il ne faut pas nier les oppositions de riverains ou d’habitants qui craignent l’explosion des méthaniseurs, un risque pourtant extrêmement limité, mais aussi la lenteur de l’instruction des dossiers, voire encore la frilosité des banques pour accompagner les projets.

 Malgré tout, le bilan tiré par les acteurs de la filière naissante lors du salon BePositive, consacré aux énergies renouvelables qui s’est déroulé du 4 au 6 mars à Lyon-Eurexpo, n’est en définitive pas si mauvais que cela, en Rhône-Alpes du moins. L’objectif de ces acteurs, à commencer par le Conseil régional ou l’Ademe (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie), est le booster le développement du biogaz en Rhône-Alpes.

 Quarante-six méthaniseurs en fonctionnement en Rhône-Alpes

 A ce jour, quarante-six équipements de méthanisation sont en fonctionnement, produisant du biogaz, ce qui n’est pas si mal, même si la France avec 3 % seulement du biométhane produit en Europe est, il faut bien le reconnaître à la traîne, l’Allemagne avec…8 000 méthaniseurs, s’affichant loin devant.

 Actuellement, dix unités de méthanisation supplémentaire sont en construction dans la région, tandis que cinq autres ont été autorisées, mais attendent des financements.

 Pour Lionel Tricot, de « Rhônalpénergie-environnement », organisme très en pointe sur le sujet, il existe actuellement en Rhône-Alpes « un total de 125 initiatives visant à construire des équipements, soit un potentiel de 120 millions d’euros susceptibles d’être injectés dans le secteur d’ici 2016. »

 Vision optimiste de la situation ? Sans doute.

 Mais les acteurs, en l’occurrence l’Ademe, la Caisse des Dépôts, la Région et GrDF qui ont signé au cours du salon Be+, « une Charte de la Méthanisation en Rhône-Alpes », entendent bien accélérer le mouvement.

 Ainsi, Nordine Boudjelida, directeur régional de l’Ademe affiche son optimisme. « Jusqu’à présent nous avions du mal à porter plusieurs projets par an. Le rythme s’accélère : nous en avons sortis de terre pas moins de dix, en 2014. »

 L’objectif des acteurs régionaux est de créer 800 méthaniseurs, d’ici 2020.

Objectif : 10 % de biogaz dans le réseau

 Il ajoute : « Il y a deux ans seulement, 200 000 euros étaient investis dans la filière pour accompagner les initiatives. Dans le cadre du Plan Etat-Région, pas moins de 4 millions d’euros vont pouvoir être investis chaque année : ne doutez pas de la forte mobilisation de l’Etat ! »

 Il est vrai que Ségolène Royal, ministre de l’Ecologie affiche un objectif ambitieux : l’injection dans le réseau de 10 % de biogaz, d’ici 2030.

 Pour ce faire, depuis 2011, le gouvernement a instauré un tarif d’achat, entre 50 et 150 euros par mégawattheure, auquel les fournisseurs rachètent le biogaz.

 Mais l’argent n’est pas le seul nerf du développement du biogaz : un certain nombre de mesures ont aussi été prises pour simplifier les procédures. A commencer par la mise en place d’un guichet unique pour les porteurs de projet ; et la présence désormais dans chaque département, d’un référent méthanisation au sein de l’administration.

 Réduire les délais d’instruction à dix-huit mois

 L’objectif de l’Etat est de réduire à dix-huit mois les délais d’instruction des projets souvent trop long. Utopique ?

 Les chambres d’agriculture entrent également dans la danse en mettant elles aussi des spécialistes au service des agriculteurs : d’ores et déjà 7,5 équivalents temps plein sont sur le terrain pour accompagner les projets de méthaniseurs agricoles. Ce sont les agriculteurs, qui sont à l’origine de 80 % des projets. Les autres émanent d’entreprises ou de collectivités.

A écouter les acteurs, si l’on veut accélérer le rythme, l’accompagnement des porteurs de projet est indispensable. Monter un projet biogaz est complexe, nécessite de solides compétences et des financements. Si on laisse le marché générer tout seul des projets, c’est sûr, on n’ira pas loin !

 Y a t il une spécificité rhônalpine en matière de méthanisation ? Oui, pour Lionel Tricot (Rhônalpénergie-Environnement) : « Il est intéressant de constater la grande diversité des projets ce qui permet de mieux s’adapter au terrain. Chaque projet est différent. Ils vont de 35 kwh de production… 2 300 kwh. »

 Methamoly : un projet à 4 millions d’euros

 L’un des projets actuels les plus intéressants est intitulé Methamoly (Méthanisation des Monts du Lyonnais). Il se situe à la lisière de la Loire et du Rhône, sur les territoires des communes de Saint-Denis-sur-Coise et de Chazelles-sur-lyon..

Un projet complexe à mettre en œuvre et lourd en investissements -4 millions d’euros- mais qui offre l’originalité de mêler initiatives privées et publiques, à travers une Société d’Economie Mixte (SEM), locale, mais aussi d’associer la population à travers un appel à financement participatif, via une société de financement coopérative, la NEF (Vaulx-en-Velin).

Lancé en 2012, ce projet de méthaniseur géant associe en effet un collectif de douze agriculteurs qui investissent chacun 30 000 euros, un fournisseur d’énergie (Energicoop), Gdf Suez, la SEM « Soleil de la Loire », avec la Nef, donc et le fonds d’investissement régional « Oser ». Il devrait sortir de terre en 2017.

Destiné à traiter chaque année 16 000 tonnes de déchets il vise à produire 71 Nm3 de biogaz qui sera injecté dans le réseau. Bref, une vraie usine à gaz, mais cette fois, dans le sens positif du terme…