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Vers un démantèlement d’Areva ?

La brillante Anne Lauvergeon, l’ancienne « sherpa »  de François Mitterrand et actuelle dirigeante d’Areva, n’est pas à la fête. On connaît ses soucis concernant le réacteur nucléaire de troisième génération, l’EPR dont le 1er exemplaire en construction en Finlande a pris quatre ans de retard avec fortes indemnisations à la clef.

Mais ce n’est pas tout : pour se renflouer, elle vient d’être obligée de céder sa filiale T&D à Schneider Electric et Alstom qui vont se partager pour près de 4 milliards d’euros la machine à cash d’Areva, alors que d’autres nuages noirs se profilent sur l’avenir d’une société dirigée par l’une des rares femmes à la tête d’une grande entreprise en France.

Ce  grand remue-ménage qui se déroule actuellement autour de l’industrie du nucléaire française n’est pas sans conséquences pour Lyon et Rhône-Alpes.

Comme on peut le lire ci-contre, de la direction aux syndicats, avec une belle unanimité, tout l’ensemble du groupe Areva était opposé à cette scission voulue par le président de la République et surtout contre ce choix franco-français qui provoque de facto un dépeçage du fleuron Areva T&D.

Autre regret, la filiale Areva T&D avait beaucoup progressé sur les smart-grids, ces compteurs et ses systèmes intelligents qui vont nous permettre de moins consommer d’électricité. Des technologies qui vont filer chez Schneider Electric, mais qui devraient, il est vrai, rester dans le giron rhônalpin vu la forte implantation iséroise du leader français des équipements à basse et moyenne tension.

Il faudra attentivement observer la suite des événements qui pourraient concerner cette fois l’ancienne Framatome, très présente à Lyon et qui a constitué, lors de sa création, avec la Cogema, l’un des plus importants apports d’Areva.
Un ex-Framatome qui retrouverait alors son rôle de sous-traitant après voir joué les premiers rôles.
La stratégie d’Anne Lauvergeon visant à s’émanciper depuis près de dix ans du statut de vassal d’EDF, serait alors définitivement mise à mal.

Le grand meccano de nucléaire est lancé sous l’impulsion de l’Elysée. Tout laisse à penser qu’en la matière, EDF est en train de reprendre la main. Henri Proglio qui vient de s’installer à la direction d’EDF n’a pas caché ses ambitions en la matière : « avoir une industrie nucléaire qui fonctionne, cela implique qu’on repense toute la filière, en particulier les rôles d’Areva et du CEA »,a-t-il confié aux Echos.

C’est clair : il veut faire de l’électricien français le patron incontesté de l’atome en France. Dans son esprit, cette volonté pourrait passer par une ouverture du capital de la filiale de réacteurs d’Areva. Et d’enfoncer le clou : « Ça m’intéresse d’avoir un Framatome fort, adossé à d’autres acteurs français et étrangers. » Pour lui, la fusion de Framatome (devenu Areva NP) et de la Cogema était « probablement une erreur. » Toujours selon lui, le concepteur de réacteurs  était un« sous-traitant important  de la filière » : tel est le nouveau rôle qui pourrait lui être dévolu.

Dans sa croisade, Henri Proglio devrait être épaulé par André Roussely à qui Nicolas Sarkozy vient de confier la direction d’un groupe de travail chargé de proposer à l’Etat un scénario de réorganisation de la filière nucléaire française. Or, il n’a échappé à personne qu’André Roussely est un ancien patron d’EDF dont le rapport, sans lui faire un procès d’intention, ne devrait pas contrecarrer trop fortement les intérêts de son ancienne maison.

Bref, l’échiquier industriel et nucléaire de Rhône-Alpes risque de voir se jouer au sommet une partie dans laquelle sont en jeu à la fois des milliers d’emplois, ainsi que notre avenir énergétique. Et dont nous ne pourrons que constater les retombées. Bonnes ou mauvaises.