Macron : et maintenant ?

Emmanuel Macron, le nouveau président, est assurément un homme pressé. Après une « concertation » avec les partenaires sociaux, sans doute dans les semaines à venir, il devrait présenter un projet de loi d’habilitation devant l’Assemblée nationale, sous la forme d’une loi Travail, El Khomri 2, puissance XXL. Qu’il entend faire passer sous forme d’ordonnances pendant l’été.
On se souvient du mouvement de grève national qu’avait tenté de lancer la CGT et FO pour empêcher le passage au Parlement de la loi Travail de Myriam El Khomry 1. Dans notre région, la raffinerie de Feyzin avait été bloquée.
Or, présage : elle l’est à nouveau actuellement. Sur des revendications catégorielles et notamment salariales, certes ; mais on peut sans difficulté imaginer que ce mouvement qui pourrait amener un arrêt total de la raffinerie, n’est pas tout à fait innocent, dans les circonstances actuelles.
On sait que la CGT, FO et SUD entendent bien participer à un troisième tour social qui pourrait bien être aussi attisé par la Mélenchonistes décidés à leur tour de prendre leur revanche après être défaits par les urnes.
Tentatives de blocage assurées
On s’apprête donc à revoir le même processus de tentative de blocage des réformes économiques pourtant nécessaires, blocage auquel il est vrai on est désormais bien habitué dans notre beau pays.
Manuel Valls alors Premier Ministre avait édulcoré la Loi Travail pour obtenir l’assentiment de la CFDT, ce qui n’a pas empêché par ailleurs le passage en force tant décrié par le 49-3.
Car les propositions du nouveau président Macron font figure pour ces opposants d’ores et déclarés, de chiffons rouges.
Ainsi, par exemple, la signature d’accords d’entreprises ou de branches pouvant déroger à la loi serait possible.
Depuis la loi Travail, seule la question du temps de travail est concernée par cette inversion de la hiérarchie des normes. La conclusion d’accords majoritaires d’entreprise permet une organisation spécifique. Le projet d’Emmanuel Macron est d’étendre cette possibilité à d’autres thématiques comme le salaire ou les conditions de travail.
Le retour de l’encadrement des indemnités prudhomales
Pour Emmanuel Macron, les indemnités aux prud’hommes sont aussi l’un des blocages du marché du travail, notamment de la part des PME. Ministre, il avait tenté de mettre en place un système d’encadrement de ces indemnités perçues par les salariés en cas de licenciement abusif.
Retoquée par le Conseil constitutionnel, la mesure fait à nouveau partie de son programme. Emmanuel Macron espère instaurer un barème précis du montant des indemnités avec un plancher et un plafond pour les licenciements sans cause réelle et sérieuse. « Le plancher permettra de protéger les droits des employés, le plafond donnera aux entreprises une visibilité et une assurance qui permettront de lever les freins à l’embauche en CDI », explique le programme d’En Marche. L’ensemble prendrait en compte l’ancienneté du salarié.
S’y ajouterait le référendum à l’initiative de l’employeur. On sait que la loi El Khomri a mis en place un nouvel outil dans les mains des syndicats: le référendum d’entreprise. Si un accord d’entreprise n’est pas validé à la majorité, mais qu’il a été signé par l’employeur et des syndicats ayant recueilli plus de 30 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections, ces derniers peuvent demander une consultation des salariés.
Le nouveau président de la République veut pousser la logique encore plus loin et permettre aux employeurs d’initier eux aussi ces référendums. A condition, là aussi, que l’accord ait été validé par les syndicats représentant 30 % des voix.
Encore une mesure susceptible de crisper des syndicats, qui n’ont jamais caché leur hostilité à cette possibilité.
Bref, le futur premier ministre dont le nom sera annoncé dimanche prochain et le nouveau président de la République devront faire œuvre de persuasion, mais aussi très probablement de grande fermeté pour faire passer cette réforme qu’ils sont désormais obligés de réussir. On imagine guère ce quinquennat démarrer sur un premier échec. Ce serait fondateur à nouveau d’immobilisme et entamerait la crédibilité d’Emmanuel Macron, alors qu’elle n’a même pas pu encore être éprouvée.
L’aval du Parlement nécessaire
Autre condition et non des moindres : que les députés de « La République en Marche », la future formation du nouveau Président ait une majorité au Parlement ou s’y rapproche suffisamment pour bénéficier d’une majorité de projet avec d’autres groupes politiques. Car même sous forme d’ordonnance, la loi Travail 2 devra avoir d’abord un premier aval du Parlement.
On l’aura compris : les semaines à venir sont à hauts risques pour le nouvel élu. Il ne bénéficiera pas de la moindre once d’état de grâce !
S’il réussit ce premier test d’ampleur, il aura montré qu’il n’a pas seulement été un bon candidat, mais qu’il possède aussi l’étoffe d’un président qui sait repousser les obstacles. Les semaines à venir vont d’entrée être décisives pour son quinquennat…