Rénovation énergétique des copropriétés : la filière alerte sur des délais d’instruction critiques
À Lyon, les organisations professionnelles de la rénovation en copropriété tirent la sonnette d’alarme face à l’allongement inédit des délais d’instruction des dossiers Écoréno’v et MaPrimeRénov’, désormais compris entre six et douze mois, et pouvant atteindre jusqu’à vingt-quatre mois selon les situations. Une accumulation de retards qui fragilise les entreprises, bloque des chantiers entiers et freine la transition énergétique sur le territoire métropolitain.
Des délais multipliés par deux ou trois en cinq ans
Les données consolidées par les entreprises, maîtres d’œuvre et syndics révèlent une augmentation spectaculaire des délais d’instruction. Alors qu’ils étaient de six à sept mois en 2020, ils dépassent aujourd’hui douze mois et atteignent parfois dix-huit mois. Un exemple cité illustre l’ampleur du phénomène : une demande déposée en décembre 2024 n’a reçu une notification qu’en novembre 2025.
Les organisations professionnelles BTP Rhône et Métropole, l’UNTEC et l’UNIS Lyon-Rhône, réunies le 27 novembre 2025, confirment un diagnostic partagé sur ce ralentissement massif.
Des dizaines d’opérations paralysées et 75 millions d’euros à l’arrêt
Les maîtres d’œuvre de l’UNTEC identifient entre cinquante et soixante-deux opérations de copropriété actuellement bloquées, soit près de 3 000 logements. Le montant total des travaux gelés approche les 75 millions d’euros.
Ce gel a des répercussions en cascade sur toute la chaîne de valeur : conception, planification, mobilisation des entreprises et votes des copropriétaires.
Des entreprises sous tension et des trésoreries fragilisées
Les entreprises de ravalement, d’isolation et de rénovation énergétique décrivent une situation particulièrement difficile. Selon leurs estimations, 30 à 40 % de leur chiffre d’affaires se trouvent immobilisés par les retards administratifs.
Les décalages de planning, allant de six à douze mois et parfois jusqu’à dix-huit ou vingt-quatre mois, désorganisent les équipes et bloquent les recrutements. Certaines entreprises ont même dû préfinancer jusqu’à 500 000 euros de travaux pour éviter l’arrêt des chantiers, fragilisant davantage leur trésorerie.
Des copropriétaires pénalisés et une transition énergétique ralentie
Le report des travaux maintient des consommations énergétiques élevées dans les immeubles concernés et retarde les gains potentiels, estimés entre 20 et 35 %. Les charges de chauffage restent donc plus importantes et certains projets, pourtant déjà votés, risquent l’abandon.
Les organisations soulignent également la complexité administrative et les incohérences rencontrées dans le traitement des dossiers, entraînant une accumulation de délais entre les différents acteurs impliqués.
Un risque réel pour l’atteinte des objectifs climatiques
Au-delà des difficultés économiques, ces retards compromettent directement les ambitions climatiques portées par les pouvoirs publics. Le vieillissement du parc immobilier se poursuit, faute de travaux lancés dans des délais raisonnables.
Les organisations appellent à un plan d’urgence
Face à cette situation, les acteurs professionnels demandent une action rapide : un plan d’urgence pour désengorger les services d’instruction, un calendrier clair de traitement des dossiers et une réduction des délais de paiement des aides.
Ils préconisent également la mise en place d’un pilotage unique et coordonné du parcours de subvention, afin de fluidifier les échanges et sécuriser copropriétaires comme entreprises.
Encadrement des loyers : l’UNIS Lyon-Rhône demande des ajustements
Au-delà de la question des délais, l’UNIS Lyon-Rhône profite de cette communication pour réaffirmer ses réserves sur l’encadrement des loyers en vigueur à Lyon et Villeurbanne depuis 2021. Selon l’étude CLAMEUR citée, le dispositif entraînerait une réduction de l’offre locative et un frein au financement des travaux énergétiques.
Les incohérences relevées concernent notamment la segmentation en cinq zones, jugée insuffisante, et le critère du nombre de pièces qui aboutit à des situations paradoxales, comme des T3 affichant un loyer de référence inférieur à celui de T2 plus petits dans un même immeuble.
L’organisation pointe également l’absence de prise en compte des rénovations énergétiques dans le calcul des loyers de référence, ce qui décourage les investissements.
Des propositions pour un dispositif plus cohérent
L’UNIS Lyon-Rhône avance plusieurs pistes d’amélioration : augmenter le nombre de zones, supprimer le critère du nombre de pièces et remplacer la période de construction par la classe énergétique des logements. L’objectif serait d’encourager les rénovations tout en garantissant un meilleur équilibre entre propriétaires et locataires.
Droit de réponse aux déclarations de la Métropole
L’organisation apporte également des précisions après plusieurs prises de parole récentes de la Métropole de Lyon. Elle assure n’avoir influencé ni le calendrier du Tribunal Administratif ni recherché une simple faille technique. Elle réfute aussi toute participation à l’élaboration du zonage contesté, rappelant avoir quitté les réunions faute de prise en compte de ses recommandations.
Selon elle, les propriétaires bailleurs restent largement absents des communications institutionnelles sur ce sujet, alors qu’ils constituent un maillon essentiel du marché locatif.
Vers un dialogue renouvelé
L’UNIS Lyon-Rhône conclut en appelant à une évolution du dispositif d’encadrement des loyers afin de concilier accessibilité pour les locataires et viabilité pour les propriétaires. Les organisations estiment que seule une concertation approfondie avec les élus permettra d’améliorer durablement la situation.
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