Compétitivité : les chiffres qui font mal
Evoquant une « reprise poussive », l’Insee Rhône-Alpes avait montré le chemin en janvier dernier. Cette fameuse reprise est confirmée dans la toute dernière enquête de conjoncture de la Banque de France Rhône-Alpes (*).
Ce ne sont pas seulement les chiffres de la (petite) croissance retrouvée, mais les chefs d’entreprises rhônalpins qui le disent eux-mêmes.
Interrogés par la succursale Rhône-Alpes de la Banque des Banques, ils anticipent en général une hausse de leur chiffre d’affaires en 2014.
Selon les anticipations de ces dirigeants, celle-ci devrait être de 3,2 % dans l’industrie (contre – 0,8 % en 2013), de 4 % dans les services aux entreprises, mais pas de hausse en revanche dans le BTP qui pourtant était en croissance de 0,5 % l’année dernière. Il devrait baisser de 0,5 % cette année.
Ces mêmes anticipations des chefs d’entreprises, secteur par secteur, dans l’industrie illustrent un vrai retournement de conjoncture dans les matériels de transport qui avaient plongé de 14,6 % l’année dernière, mais devraient progresser de 5,6 % cette année ; et de 3,6 % dans les secteurs du caoutchouc et du plastique (contre – 2,3 % en 2013). Même le textile connaîtrait un regain : de + 3,6 %. La production resterait en revanche atone dans l’industrie pharmaceutique (+ 0,2 % contre – 0,4 % en 2013).
L’export, planche de salut
Majoritaires dans l’économie rhônalpine, les services se porteraient, toujours selon les anticipations des chefs d’entreprises, encore mieux. L’activité des agences de travail temporaire grimperait de 4,5 %, celle de l’informatique de 4,1 %, de l’ingénierie et des études technique, de 3,3 %. De son côté, le transport routier choisirait la pente douce : + 1,3 %.
A quoi sera due cette croissance annoncée qui devrait s’établir dans une fourchette située entre + 0,9 % et un peu plus de 1 % ? Pas à la consommation, même si les Rhônalpins puiseront dans leur bas de laine pour maintenir cette année leur pouvoir d’achat.
Elle devrait provenir pour une petite part de l’investissement des entreprises qui devrait progresser légèrement-une première depuis longtemps- ; mais surtout de l’export, la planche de salut de l’année et cela grâce à la fin de la crise européenne et à la reprise chez nos voisins de l’Union Européenne avec qui nous réalisons 60 % de nos échanges.
Aucun doute pour la Banque de France : la croissance 2014 proviendra des performances de nos entreprises à l’export.
Cela sera bien nécessaire : hormis la pharmacie, la chimie et l’industrie agro-alimentaire, de nombreux secteurs n’ont pas encore retrouvé leur niveau d’avant-crise, en l’occurrence, le textile, l’habillement, l’électronique, l’informatique, la métallurgie, le matériel de transport…
Cette même enquête de conjoncture recèle aussi un autre intérêt : celui de montrer les racines du mal français, en l’occurrence, la baisse mortifère de la compétitivité des entreprises.
Un niveau de compétitivité des entreprises jamais aussi bas
Ainsi le décrochage du taux de marge des entreprises est intervenu début 2007.
Il est alors brutalement passé en un an de 32 % à 29 %, avant de poursuivre sa baisse jusqu’à son niveau actuel, historiquement bas : 28 %.
Le CICE (Crédit d’Impôt pour la Compétitivité et l’Emploi) est en train de le faire remonter à 29 %.
Mais cela ne sera pas suffisant. D’où l’importance cruciale que le pacte de responsabilité proposé par François Hollande ait une réelle consistance et permette de prolonger cette hausse de la compétitivité des entreprises sans laquelle il n’y aura pas de véritable reprise.
Sinon, ce redémarrage tant attendu risquerait de rester ce qu’il est, pour l’heure : poussif. Seule cette réforme pourrait être gage d’une croissance plus soutenue.
(*) Enquête réalisée par les huit succursales de la Banque de France Rhône-Alpes au cours du mois de décembre dernier auprès d’un échantillon de 2 800 entreprises.