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Entreprises : la forte hausse des impayés risque de gripper la reprise

Les signaux en ce sens se multiplient. Laurent Fiard pour le Medef et Philippe Guérand pour la CCI Auvergne-Rhône-Alpes en ont pris conscience. Le montant des factures impayées par les entreprises explose en France. Beaucoup d’entreprises l’ont ressenti. Dans une étude, le cabinet d’audit KPMG estime son augmentation à près de 84 %. Il existe là un vrai danger, insidieux.

Au début de la crise, la bouche en cœur, les dirigeants des grandes entreprises expliquaient qu’ils allaient porter une grande attention aux impayés, sachant pertinemment qu’il y avait là grand risque pour leurs sous-traitants, notamment.

Lui-même, Laurent Fiard, président du Medef Lyon-Rhône a expliqué au micro de BFM Lyon la semaine dernière qu’il était désireux que soit mise en œuvre « une dynamique de confiance : que toute la chaîne des entreprises soit respectueuse des délais de paiement : il faut que tout le monde puisse s’entraider ! »

A l’arrivée pourtant, ces belles paroles ne se traduisent pas toujours dans les actes, semble-t-il.

Rappelons que le crédit inter-entreprises est un enjeu majeur pour l’économie française avec un montant évalué par la Banque de France à plus de 700 milliards d’euros, ce qui en fait la première source de financement des entreprises. Il représente à lui seul l’équivalent de trois à quatre fois le montant des crédits court terme accordés aux entreprises par l’ensemble des banques.

Chaque année, sur la période récente, la Banque de France estime que les retards de paiement sont à l’origine d’une faillite d’entreprise sur quatre, impactant principalement les PME… Qui plus est, en période de crise.

Et vu les chiffres qui galopent de semaine en semaine depuis le début de la crise du Cod-19, les risques s’accentuent sérieusement.

Selon l’Observatoire économique Covid-19 des CCI d’Auvergne-Rhône-Alpes, près de 60 % des entreprises de la Région signalaient début mai, des difficultés de trésorerie, soit une remontée de cinq points par rapport à l’enquête précédente, mi-avril.

Bien sûr l’interruption pendant deux mois d’une bonne part de économie régionale et le recul du chiffre d’affaires qui s’en est ensuivi est la cause quasi-générale de ces difficultés financières.

Mais, problème, le phénomène est aggravé « par l’augmentation des délais de règlement et les impayés qui continuent de peser sur les entreprises », insiste le baromètre Covid-19.

« Situation préoccupante »

Une situation d’autant plus ennuyeuse que le bilan d’avril (1er mois complet de confinement) en termes de chiffre d’affaires traduisait bien le choc économique majeur subi par les entreprises : en effet, pour 54 % d’entre elles, la baisse du chiffre d’affaires s’établissait à au moins 50 %..

« La situation reste préoccupante en termes de trésorerie et de niveau d’impayés », est bien obligé de constater Philippe Guérand, le président de la CCI de région Auvergne-Rhône-Alpes

Une étude toute fraiche du groupe d’audit KPMG vient confirmer ce problème : environ 3,5 factures sur 10 sont échues avec plus de 10 jours de retard, contre environ 2 sur 10 avant le confinement.

De même, le nombre de factures payées de manière hebdomadaire chute à environ 680 000 factures contre une moyenne de 780 000 avant la période du confinement, soit 12 % de baisse.

KPMG a constaté que ce sont les entreprises fournissant des services et de la prestation intellectuelle qui subissent des retards de paiement plus importants.

A l’inverse, les entreprises délivrant des biens ou du transport ont des délais plus courts.

Bref, KPMG est bien obligé de le constater «  la crise du Covid-19 et l’impact du confinement ont d’ores et déjà des conséquences majeures sur les délais de paiement. »

Le montant des factures considérées comme impayées a presque doublé par rapport à avant la crise en France. Selon le site de l’éditeur de logiciels spécialisé Sidetrade utilisé par le cabinet d’audit et de conseil, plus d’un tiers des factures en France étaient impayées (35,1 %) au 2 mai, un chiffre en hausse de… 82 % comparé au début de la pandémie !

Après avoir constaté cette situation et pour éviter que l’économie se grippe, le gouvernement a mis en place fin mars un comité de crise sur le sujet. Ce comité a mis en garde début mai contre de « nouvelles pratiques anormales », dont des absences de validation de factures et des retards dans l’émission de bons de commandes de la part de certaines entreprises.

Le danger est que des entreprises, dans cette période délicate au chiffre d’affaires raréfié, voient leur fonctionnement se gripper peu à peu et se retrouvent étranglées, avec dépôt de bilan à la clef. Alors que pour bon nombre d’entre elles, la faillite aurait pu probablement être évité….