L’arrivée d’Hexcel pourrait bien marquer l’envol de la filière composites en Rhône-Alpes
Ce n’était pas expressément voulu, mais la collision entre les deux informations a été mardi 30 septembre du plus bel effet.
Le matin, l’on apprenait que l’avion révolutionnaire d’Airbus, l’A 350, composé à 53 % de matériaux composites détrônant l’acier, avait été certifié. Cela signifiait que la construction pouvait démarrer. Cet avion a déjà été commandé à 750 exemplaires !
Une usine qui tournera à 90 % pour l’aéronautique
L’A 350 : Airbus sera le plus gros client de la future usine (Photo DR)
L’après-midi à Roussillon en Isère, le groupe américain Hexcel confirmait officiellement qu’il avait choisi cette plateforme chimique iséroise pour construire une nouvelle usine. Un investissement de 200 millions d’euros pour fabriquer des panneaux en fibre de carbone, destinés à 90 % à la filière aéronautique : essentiellement pour construire le fuselage de l’A 350, mais aussi pour concevoir les pales du réacteur « Leap » de Safran, les deux mêlés amenant une économie de près de 15 % de la consommation de kérosène. C’est la raison pour laquelle les compagnies aériennes se l’arrachent.
Un contrat a été signé en 2008 par Hexcel avec Airbus pour l’A 350. Il représente 5 millions de dollars de chiffre d’affaires par appareil, 5 milliards de dollars sur l’ensemble du contrat !
Cette heureuse surprise conforte Rhône-Alpes comme première région chimique de France, car ce dossier revient de loin. La société américaine qui est le leader mondial des composites avait d’abord mis en concurrence près de quatre-vingt sites en Europe, pour ne conserver, in fine, début septembre qu’une short list où l’on trouvait un site en Grande-Bretagne, Fos-sur-Mer, la plateforme chimique de Roussillon et …les Etats-Unis.
Fabriquer des matériaux composites est très énergivore. Or, l’on sait qu’avec les gaz de schistes, le coût de l’énergie a énormément baissé aux USA.
Une bonne négociation avec EDF
Patrick Merlot, directeur pour la France et Nick Stanage, Pdg (photo DL)
C’est pourtant la plateforme chimique de Roussillon qui l’a emporté. Les raisons sont triples : la négociation avec EDF pour obtenir des coûts de l’énergie concurrentiels a manifestement porté ses fruits. Le fait que la plateforme chimique de Roussillon a la particularité de mutualiser ses coût grâce à un GIE, « Osiris », a joué aussi un rôle non négligeable. Hexcel va en devenir actionnaire.
Car le « deal » de Nick Stanage, le Pdg américain d’Hexcel à ses équipes françaises est tout de même ambitieux dans un France réputée peu compétitive : arriver à produire des composites à un coût proche de celui atteint aux USA…
Le dernier atout qu’avait dans sa manche, Thierry Merlot , le directeur France d’Hexcel est que l’implantation du groupe US sur la plateforme de Roussillon était logique dans la mesure Le leader des composites possède déjà dans la région deux usines partie prenantes du process de fabrication : dans le nord de l’Isère aux Avenières où se trouve la plus grande usine de tissage carbone d’Europe ; et à Dagneux, dans l’Ain, avec un site d’imprégnation de nappes et de tissus carbone.
Également présent à Nantes et Toulouse, le groupe qui est à la fois coté à la Bourse de New York et de Paris, emploie 890 personnes en France, pour un chiffre d’affaires de 402 millions d’euros.
Outre le signal fort que représente cet investissement de 200 millions d’euros qui pourrait être doublé en 2018/2019 selon Thierry Merlot, le directeur France d’Hexcel, cette arrivée pourrait bien donner un coup d’accélérateur à la filière composite rhônalpine.
Car elle marque l’arrivée de l’ensemble de la chaîne de fabrication de composites, des « précurseurs », à l’induction, en passant par le tissage, etc.
Hexcel travaille déjà dans l’Ain avec la société Duqueine, elle aussi, très présente dans l’aviation. Il existe aussi en Rhône-Alpes d’autres grands groupes spécialisés dans les textiles techniques, à l’instar de Porcher, Chomarat, Ferrari…
Un « Monsieur Composites » pour animer le secteur
Les composites à la jonction du textile et de la chimie (photo DR)
Autre signal intéressant : ce n’est pas un hasard, si un « Monsieur Composites », Jean-Marc Feuillas, un ingénieur chimiste issu de Solvay vient d’être désigné en Rhône-Alpes. Ce sera lui l’animateur de cette filière promise à un grand développement
Pour Patrick Merlot, le directeur France d’Hexcel, aucun doute, « le pack de la fibre industrielle a un énorme avenir en Rhône-Alpes ! »
Ce serait d’ailleurs un juste retour des choses car Nick Stanage, le Pdg d’Hexcel a tenu à rappeler que les composites sont au croisement de deux secteurs : le textile et la chimie. Deux domaine qui sont justement à l’origine de la puissance de l’économie régionale.