La ville connectée (ou smart city) proposée par les élus ne fait pas du tout rêver ses habitants
Les élus de Lyon et de la Métropole lyonnaise n’ont que ce mot à la bouche : « Smart city ». Et de s’envoyer des fleurs en ajoutant que « Lyon est devenue « une véritable smart city de dimension européenne ». Et s’ils faisaient fausse route ? C’est ce que l’on peut penser à l’aune d’un sondage qui montre que les Français et a fortiori les Lyonnais n’accrochent pas, mais alors pas du tout, à ce concept.
Rappelons d’abord ce qu’est une smart city, autrement dit une « ville intelligente » : c’est une ville dense et connectée, voire ultra connectée.
Cette enquête portant sur 4 000 personnes dans toute la France (*), montre qu’il y a encore beaucoup de chemin à accomplir pour réhabiliter la notion tout simplement … urbaine. « La nuisance, le bruit, la pollution, la promiscuité, la fatigue, la cherté de la vie l’emportent sur le versant positif, à savoir l’effervescence et la culture », résume ainsi Philippe Moati professeur d’économie et coprésident de l’Obsoco (*) à l’origine de cette enquête, cité par « Le Monde ».
Pire encore : 59 % des personnes interrogées dans les villes centres des seize métropoles françaises, sont prêt à changer d’air et aspirent à « déménager et aller vivre ailleurs… »
Les urbains se projettent dans une cité de taille moyenne
Ils se projettent dans une cité de taille moyenne, voire même un village, situé à la périphérie d’une grande agglomération. Les petits bourgs qui se sentent à l’écart des grandes métropoles ont donc toutes leurs chances à condition de ne pas en être trop éloignés.
L’ultra-connection de la ville serait l’alpha et l’oméga ? Confrontés à six modèles d’évolution de la commune, les Français plébiscitent d’abord la « ville nature » et repoussent à la sixième et dernière place « la ville connectée ». Pas geeks pour un sou, les Français…
Ils redoutent en fait la ville connectée qu’ils assimilent sans doute au Big Brother de George Orwell, avec la mainmise de l’entreprise et la gouvernance à distance !
Les politiques auraient donc tout faux.
Philippe Moati, toujours cité par Le Monde y voit « un malaise plus général sur le progrès, la modernité, la malbouffe et l’hyperconnection… »
Pour lui, « il y a un rejet très net des excès de la ville… »
Plus concrètement, 51 % des habitants des grandes aires urbaines comme la métropole lyonnaise sont d’abord intéressés « par les équipements mutualisés entre voisins ».
Près de 65 % seraient « utilisateurs de bornes de services de voisinage » . Et 64 % souhaitent que leur commune propose « un budget participatif. »
Pour les moyens de transports, les navettes fluviales pour leur lenteur et leur calme et les navettes autonomes sont plébiscitées. A part le petit vaporetto qui relie la Presqu’île à la Confluence et connaît il est vrai un grand succès, on en est encore très loin à Lyon.
Dans cette enquête, les urbains assurent qu’ils aiment aussi la marche et le vélo. 60 % des actifs pratiquent le travail à distance de leur entreprise, dont 36 % en dehors de chez eux.
Un déficit d’écoute
Il y a donc loin entre la vision que veulent mettre en œuvre les élus et les urbanistes et les souhaits des habitants. Il y aurait même un mur d’incompréhension et à tout le moins un déficit d’écoute des habitants de la part des décideurs.
Voilà qui en tout cas relativise les grandes visions prospectives façon smart city : les Français disent à travers ce sondage : messieurs, redescendez sur terre !
Assurément, il va falloir que nos élus fassent preuve de beaucoup de pédagogie pour convaincre les citoyens que cette ville connectée qu’ils veulent promouvoir à tout crin peut leur apporter davantage de qualité de vie, en l’occurrence, moins de pollution, des énergies renouvelables, une consommation énergétique en baisse, tout simplement une vie meilleure. C’est pas gagné…
(*) Enquête réalisée par l’Observatoire société et consommation (l’Obsoco) et le cabinet d’études Chronos. Elle repose sur un questionnaire adressé à 4 000 personnes dans toute la France.