Le retour de la Bourse de Lyon
« Que constate-t-on, partout en Europe ? Que les régions qui marchent le mieux, ce sont celles qui ont su se saisir des outils de financement de leurs entreprises… »
Cette constatation du responsable de la société de Bourse Alternativa, deuxième opérateur boursier en France après Euronext, spécialisé dans la cotation des PME, rappelle un temps pas si lointain où Lyon avait sa corbeille boursière autour de laquelle s’affairaient des agents de change.
Sept régions en France avaient alors leur Bourse des valeurs. Elles ont disparu peu à peu, absorbées par la Bourse de Paris qui, elle même a fusionné avec Euronext mettant en œuvre une hyper-centralisation peu favorable aux PME.
Ce n’est sans doute pas un hasard si l’époque au cours de laquelle Lyon avait développé sa Bourse correspond à l’une des périodes les plus dynamiques de son histoire économique.
Les Bourses de valeurs régionales avaient alors vu de 1914 à 1928 leur capitalisation multipliée par neuf, atteignant jusqu’à 16 % de la capitalisation boursière nationale !
L’histoire bégaierait-elle ?
La CCI de Lyon vient de lancer ce qui pourrait s’apparenter à une Bourse de Lyon, version 21ème siècle. Baptisée « Place d’échange », elle a coté sa toute première entreprise, Euroglass, qui vient de lever 600 000 euros.
Sept ans pour mettre au point « Place d’Echange »
Il a fallu sept ans pour que la CCI de Lyon mette au point ce projet qui ne veut en rien concurrencer les dispositifs existants, qu’il s’agisse d’Euronext, d’EnterNext, la nouvelle Bourse des valeurs moyennes, ou du crowdfunding, très en vogue actuellement.
« Le but est de répondre aux besoins de financement des TPE et des PME qui ont très peu d’outils à leur disposition lorsqu’elles désirent augmenter leurs fonds propres de 200 000 à 1 million d’euros, sans que leurs dirigeants soient amenés à perdre le contrôle de leur entreprise. Il s’agit d’un capitalisme de proximité : chacun pourra être acteur de l’économie de sa région », assure Emmanuel Imberton, président de la CCI de Lyon.
Il s’agit de répondre aux besoins spécifiques des PME, non pas dans le court terme, mais à moyen et long terme.
Si techniquement, il a fallu beaucoup de temps pour mettre au point cette « Place d’Echange », le principe est assez simple.
Un comité de sélection
L’entreprise désireuse de lever des capitaux passe d’abord par un comité de sélection. Elle fait ensuite, si elle est agréée, l’objet d’un audit d’un cabinet indépendant qui calcule sa valeur réelle.
La cotation elle-même ne s’effectue pas en continue, comme sur les grandes bourses des valeurs, mais avec un « fixing » qui se déroule une fois par mois.
Les détenteurs d’actions connaissent donc régulièrement la valeur de leurs actions qu’ils peuvent revendre quand ils le désirent : ils ne sont plus « scotchés » à celles-ci.
Philippe Valentin, le président de « Place d’Echange » pense avoir trouvé avec ses équipes et Alternativa qui assure le fonctionnement de ce nouvel ensemble, un système qui favorise « un capitalisme patient, plébiscité par les chefs d’entreprise avides de booster leur entreprise tout en gardant la maîtrise de leur capital. C’est une solution de fonds propres créé par des chefs d’entreprise pour des chefs d’entreprise… »
Une dizaine de sociétés en lice pour être cotées
Derrière Euroglass, première entreprise cotée sur cette Bourse de proximité, d’autres sociétés sont déjà en lice : « Mille et un Repas », une société basée à Ecully, axée sur la gastronomie collective ; ou « Processium », entreprise basée à Villeurbanne, spécialisée en génie des procédés industriels pour la chimie et les biotechs, sont déjà sur les rangs. Une dizaine de chefs d’entreprise ont déjà marqué leur intérêt.
Du succès ou non de ces premières cotations dépendra la réussite de cette nouvelle Bourse de Lyon qui, a minima-pourrait coter au moins vingt PME par an, voire plus.
D’autre régions lorgnent d’ailleurs de près ce lancement pour éventuellement adopter ce nouveau concept qui pourrait bien faire tache d’huile dans l’Hexagone.
On se retrouverait alors dans la configuration du début du 20ème siècle lorsque la France possédait sept Bourses régionales…