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Les 100 jours désarçonnants de Laurent Wauquiez

« On ne va pas tout révolutionner en 100 jours, mais les engagements que j’ai pris, le programme d’économies, d’essayer de revoir la politique de formation et du social dans notre région, de travailler sur l’apprentissage, les engagements pour améliorer la sécurité des TER, les gares et les lycées, c’est tout de suite, on n’attend pas. »

C’est ce qu’avait annoncé Laurent Wauquiez sitôt après son élection au micro de France 3.

Et d’ajouter peu après lors de ce même interview : « Ce qui m’intéresse, c’est que pendant ces 100 jours, on commence à voir la différence… »

Qu’en est-il effectivement un peu plus de 100 jours plus tard.. ?

 Un style qui tranche

 Première constatation : la forme désarçonne. La manière est parfois abrupte. Il coupe les micros des élus qu’il juge trop bavards, interrompt rapidement le feu roulant des questions des journalistes lors d’une conférence de presse qui s’appuyait sur peu d’éléments concrets, présente le budget 2016 à la presse avant de l’avoir transmis aux élus, etc.

 Bref, le style Wauquiez tranche avec celui de son prédécesseur, Jean-Jack Queyranne, beaucoup plus rond dans la forme, plus prudent, plus diplomate.

 Beaucoup d’annonces en revanche, voire d’effets d’annonce destinés à focaliser sur la rupture sans cesse scandée par rapport à son prédécesseur.

 D’entrée, Laurent Wauquiez a inscrit son discours sur les économies budgétaires, à hauteur de 75 millions sur le fonctionnement, 300 millions d’euros sur le mandat, avec un certain nombre de décisions, l’amenant à rogner sur les portables des élus ou à diminuer le parc de véhicules de la collectivité régionale.

 Mais dans le même temps, il a effectué des annonces d’investissement qui ont pu surprendre concernant un certain nombre de dossiers.

 Autoroute Lyon-Saint-Etienne, Musée des Tissus, Cité de la Gastronomie…

 Les engagements se sont multipliés dont certains inattendus : pour soutenir à hauteur de 100 millions d’euros un projet de nouvelle autoroute entre Lyon et Saint-Étienne. Pour le sauvetage provisoire du Musée des Tissus de Lyon. Pour accompagner le festival Jazz à Vienne : 75 000 euros, soit une multiplication de la subvention régionale par deux, alors que globalement le budget régional à la culture devrait diminuer. Pour accompagner la future Cité de la Gastronomie au sein du Grand Hôtel Dieu (20 millions a minima). Pour mettre en œuvre la promesse de campagne du retour des bourses au mérite (3 millions d’euros)…

Des promesses budgétaires intenables, comme l’affirme Jean-Charles Kohlhaas, le chef de file des Ecologistes ?

Grosse dépense et sérieuse contrainte

Car une grosse dépense et une sérieuse contrainte s’annoncent, celle d’abord du futur Campus numérique au sein de l’ancien siège de la Région à Charbonnière et une ligne rouge qu’il s’est fixé lui-même : aucune augmentation pendant son mandat de la fiscalité régionale ; et ce, alors que les dotations budgétaires en provenant de l’Etat ne cessent de diminuer. Heureusement vu la reprise de l’économie, les ressources tendent à rentrer un peu mieux dans les caisses de la Région.

Pendant ces 100 jours, Laurent Wauquiez s’est également distingué en étant le seul président de région, parmi ses collègues Les Républicains, à refuser d’appliquer le plan de formation de 500 000 chômeurs de François Hollande. Un plan qui, selon lui, ne vise qu’à les «sortir des statistiques de Pôle emploi à quelques mois de la présidentielle».

La sécurité est un autre de ses chantiers dans lequel il s’est fortement engagé, avant de se heurter à la réalité du terrain.

Portiques à l’entrée des lycées

L’installation de portiques de sécurité dans les lycées d’Auvergne-Rhône-Alpes (un investissement de 10 millions d’euros, selon Laurent Wauquiez) était en effet une des mesures phare de sa campagne, annoncée après les attentats du 13 novembre. Concrètement très difficile à réaliser : combien de temps faudrait-il pour faire passer des centaines d’élèves sous des portiques semblables à ceux des aéroports ? Qui plus est, cette mesure se heurte à l’opposition grandissante de proviseurs et de parents. En définitive les « portiques » de la campagne électorale sont en train de se transformer en simples tourniquets ou en couloirs rapides à vitres coulissantes, comme dans le métro. Quinze lycées sont déjà équipés de la sorte…

Face à cette entrée en fonction désarçonnante, Laurent Wauquiez bénéficie néanmoins de deux atouts.

D’abord, sa majorité reste toujours soudée derrière lui, UDI et MoDem compris.

Comme on avait pu déjà le constater lors de la campagne électorale, il a en outre conquis les chefs d’entreprise, comme on a pu le voir lors du Printemps du Medef où il était tout sourire pour parler de la Métropole au côté de Gérard Collomb. Son style direct et sa volonté zéro impôts à la région plaisent incontestablement au milieu patronal.

Après les orientations budgétaires débattues le 17 mars, le juge de paix de cette désarçonnante mise en jambe à la tête de la région sera le débat et le vote sur le budget primitif 2016 programmés les 14 et 15 avril. Cette fois l’exécutif devra aller au fond des choses, hors effet d’annonces…