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Loi travail : vers un cinquième tour dans la rue.. ?

Emmanuel Macron n’a pas choisi la voie la plus facile pour démarrer son quinquennat en annonçant dès cet été une loi travail bis à côté de laquelle celle élaborée par le précédent gouvernement apparaîtrait bien pâlichonne.

On a vu les remous et les manifs que cette dernière, menée par Myriam El Khomri, a provoqué dans les rues de l’Hexagone.

Cette loi travail 2 présente le risque qu’après les deux tours de la présidentielle et ceux des législatives, un cinquième tour se mette en branle dans la rue, attisé par les partis sortis vaincus de ce long épisode électoral et qui prendraient alors leur revanche.

C’est la raison pour laquelle, bien conscients de l’enjeu, Emmanuel Macron et son premier ministre ont tenté de déminer l’affaire en menant en amont une intense concertation avec les organisations syndicales. Et d’assurer que pendant que durera la rédaction de cette loi, cette concertation se prolongera tout l’été. Edouard Philippe n’a de cesse de répéter en antienne que les syndicats « seront entendus, respectés, écoutés »…

Reste que l’heure de vérité s’annonce, puisque ce mercredi 28 juin doit être présenté en conseil des ministres le projet d’habilitation des ordonnances. Le gouvernement va devoir donner un véritable contenu à cette loi, ou du moins un premier habillage, ce qui serait susceptible d’agiter le chiffon rouge. Ce qui a d’ailleurs amené la ministre du travail, Muriel Penicaud, une grande spécialiste du droit du travail, à atténuer la semaine dernière par avance les conséquences du futur contenu de la loi en assurant que « des propositions syndicales se retrouveront bien dans le texte »…

Cela sera-t-il suffisant pour éviter le douloureux épisode de la loi El Khomri et son cortège de manifs et d’échauffourées encore présentes dans les mémoires ?

Les points de friction ne vont pas manquer si la loi telle correspond à ce qui a été annoncé, à l’instar du plafonnement des indemnités prud’homales ou de la primauté donné aux accords d’entreprises sur ceux de la branche.

A cet égard, le gouvernement est entre le marteau et l’enclume. Il ne peut affronter ouvertement les syndicats de salariés, mais il ne peut en ce début de quinquennat décevoir le patronat avec une loi qui serait édulcorée par rapport aux attentes.

Etat des forces syndicales en présence

Pour ce faire, il faut évaluer l’état des forces syndicales en présence, avant la bataille estivale qui s’annonce. Or, le rapport de force apparaît sensiblement différent de celui de l’ère Hollande.

D’abord, pas question pour le gouvernement de s’appuyer sur la seule CFDT comme cheval de Troie pour faire passer la loi, comme ce fut le cas pour la loi travail 1. Une position qui convient d’ailleurs à la centrale de Laurent Berger qui avait alors pris beaucoup de coups.

Une position qui sied également à FO qui voit là une occasion de rentrer dans le jeu contractuel, son véritable ADN par rapport à l’opposition frontale qui prévalait dans la lutte contre la loi El Komri.

Reste bien sûr l’insaisissable CGT et son premier secrétaire aux moustaches tombantes. Eh bien, pour l’heure, elle n’est pas encore sortie du bois, restant volontairement en retrait, laissant sourdre de temps à autre de lourdes menaces.

La CGT en retrait, pour combien de temps ?

Après avoir perdu sa première place au profit de la CFDT chez les salariés du privé, la CGT va-t-elle vouloir à nouveau montrer ses muscles, d’autant qu’actuellement au sein de la centrale de la rue de Montreuil, ce sont les fédérations les plus radicales qui mènent actuellement le jeu ? Possible, mais pas encore sûr à 100 %.

Si le gouvernement réussit, en laissant suffisamment de marge de manœuvre sans pour autant édulcorer le texte, à ne pas s’aliéner la CFDT et FO, mais aussi la CGC et la CFTC, par essence plus pragmatiques, la CGT serait isolée. Et en perte de vitesse, elle n’aurait rien à gagner en partant seule à l’offensive, un pari qu’elle aurait de bonnes chances de perdre.

Tel est donc le pari du gouvernement qui entend profiter de l’été et des vacances pour faire passer sa loi sans que la rue intervienne. Mais il faut bien en avoir conscience, le passage qui doit mener à cette loi travail XL est étroit…