Quand Erai revient sur le devant de la scène
A vrai dire, ce n’est pas une grosse surprise pour ceux qui ont suivi ce dossier.
La chambre régionale des comptes Auvergne Rhône-Alpes n’est pas tendre avec Erai, l’ancien bras armé de la région à l’international.
Elle confirme que le conseil régional, alors présidé par Jean-Jack Queyranne n’a pas exercé le pouvoir de contrôle qui aurait dû être le sien en tant qu’unique mode de financement public.
Pire : le commissaire aux comptes pourrait voir sa responsabilité engagée pour ne pas avoir déclenché une procédure d’alerte.
« Afin de connaître la situation financière du groupe que constituait Erai et ses filiales, les administrateurs et la collectivité auraient dû exiger des comptes consolidés certifiés et des tableaux de trésorerie qui auraient révélé une situation très dégradée dès 2010″, estime le rapport définitif (*).
Pour la chambre des comptes, les membres qui siégeaient au conseil d’administration d’Erai auraient dû lancer une procédure d’alerte.
Celle-ci « aurait permis de clarifier l’intervention de l’association au profit de la région au titre de sa participation à l’exposition universelle de Shanghai et contraint les administrateurs à revoir voire même à mettre un terme au processus de filialisation ». Bref, éviter à la structure de plonger jusqu’au cou dans un investissement particulièrement dispendieux.
Au cœur de critiques : la construction du Pavillon Rhône-Alpes à Shanghai, dans le cadre de l’exposition universelle chinoise.
Ce n’était pas du tout le rôle d’Erai. Le rapport qualifie cette construction de « projet étranger à l’objet »d’Erai dont « les financements n’étaient pas prévus dans la convention d’objectifs et de moyens ».
Au centre également des critiques : le président d’Erai, Daniel Gouffé. Il lui est reproché de ne pas avoir fait voter un accord par son conseil d’administration concernant la construction de ce pavillon Rhône-Alpes, ni d’avoir demandé d’ailleurs à ce dernier de mettre en place un budget prévisionnel, ce qui aurait été tout de même la moindre des choses…
Coût de cette participation chinoise, selon la chambre régionale des comptes : « 15 millions d’euros »
Autres critiques formulées par la chambre régionale des comptes. L’exécutif n’a pas agi avec suffisamment de vigueur lorsqu’il a commencé à constater les dérives d’Erai.
Si des mesures d’économies ponctuelles ont été décidées par le président de la région, en avril 2011, et que ce dernier a ensuite lancé une procédure d’un audit externe en 2012, aucun document n’a été produit à la chambre « prouvant que la région aurait préconisé au conseil d’administration les vraies mesures de redressement qui s’imposaient et clairement identifiées par le rapport d’audit ».
Le conseil d’administration d’Erai, n’a d’ailleurs, selon la chambre, absolument pas eu connaissance des conclusions de l’audit.
Autre chiffre douloureux mis en avant par la chambre : les filiales, en l’occurrence, les agences à l’étranger d’Erai cumulaient une dette de plus de « 6,3 millions en 2014 à l’égard de Erai France, association mère ».
Le rapport fustige d’ailleurs l’absence de provisionnement qui aurait permis de constater qu’Erai « n’était économiquement plus viable dès 2011 sans une augmentation de la subvention régionale ».
Des subventions qui, par ailleurs étaient accordées « dans des conditions non conformes à la réglementation », car finançant pour une part « l’activité commerciale de l’association ».
Bref, jeudi après-midi, le débat devrait être chaud à la région Auvergne-Rhône-Alpes. Reste qu’il ne s’agit plus que d’un débat de principe, sachant qu’Erai a été liquidé et qu’il ne s’agit plus du tout pour l’actuel exécutif de reconstituer un organisme similaire.
Reste que malgré ses dérives, Erai, de l’avis de nombreux acteurs à l’international avait son utilité. On a jeté le bébé avec l’eau du bain, accentuant le gâchis financier. Mais il est désormais trop tard.
Il ne reste plus qu’à démêler l’enchevêtrement des erreurs accumulées, ce qui n’a rien de réjouissant, mais qui peut être à tout le moins pédagogique…
(*) Cité par « Acteurs de l’économie »