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La Banque suisse Pasche, filiale de la Lyonnaise de Banque, au cœur d’une double affaire judiciaire

Les descendants de Marguerite Chabot, créatrice avec son mari du magasin lyonnais « La Canadienne » portent plainte « pour démarchage illicite, complicité de fraude fiscale, faux et usage de faux,et abus de confiance ». Une autre plainte émanant cette fois de trois salariés de la filiale monégasque de la Banque Pasche a également été déposée. Leur tort ? « Avoir été des lanceurs d’alerte », selon leur avocate.

 De mémoire de journaliste, jamais une conférence de presse ne s’était déroulée à Lyon en présence d’un huissier, en l’occurrence Me Fradin et d’une sténotypiste chargée de noter les propos des organisateurs, mais aussi les questions des journalistes et les réponses qui y étaient apportées.

 Cette « première » a eu pour cadre le Club de la Presse de Lyon où l’ancien Bâtonnier du Barreau de Lyon, Philippe Genin et Me Jonquet, avocate au Barreau de Marseille avaient convié les médias pour évoquer deux affaires différentes, mais concernant un seul et même établissement bancaire, la Banque suisse Pasche et une de ses filiales, basée à Monaco.

 Il s’agit d’une banque qui est filiale de la Lyonnaise de Banque et fait partie intégrante du groupe CIC-Crédit Mutuel présidé par Michel Lucas.

 Il s’agissait pour les deux avocats de braquer les projecteurs sur une double affaire, l’une concernant les descendants d’une Lyonnaise, Marguerite Chabot qui après avoir fait fortune à partir d’un magasin très connu à Lyon, « La Canadienne », avait placé son argent d’abord au Crédit Suisse avant de le déposer dans les coffres de la banque Pasche à Genève.

 L’autre affaire concerne le licenciement de trois salariés de la Banque Pasche à Monaco, licenciés « pour avoir-selon Me Jonquet- joué le rôle de lanceurs d’alerte et dénoncé des faits sortant du cadre légal ».

 « Nous demandons simplement d’en débattre devant une juridiction »

 Chargés par leurs clients de ces deux affaires, ces deux avocats ont l’impression de se battre contre un édredon. « Nous ne mettons pas en cause le principe de présomption d’innocence , nous demandons simplement d’en débattre en contradictoire devant une juridiction. Tout simplement ! » , explique Me Genin.

 Il craint que, saisi de cette affaire, le parquet financier de Lyon composé de neuf magistrats seulement, contre vingt-trois il y a vingt ans, mette plusieurs années à instruire ce dossier.

 Du côté de la Lyonnaise de Banque et plus précisément de la maison-mère, le Crédit Mutuel, on se refuse à tout commentaire. Les questions des deux avocats, envoyées au service juridique de l’établissement bancaire n’ont reçu aucune réponse. On y suit pourtant cette affaire de près, comme en témoigne la présence d’un huissier, diligenté par ses soins dans le cadre d’une ordonnance du tribunal.

 Sollicitée par Lyon-entreprises, la Lyonnaise de Banque s’est également refusée à tout commentaire.

 Quels sont les faits incriminés par Me Philippe Genin au titre des descendants de Marguerite Chabot ?

 Il datent de fin 1999 : à cette date, Marguerite Chabot, cliente historique de la Lyonnaise de Banque se voit démarchée par la Banque Pasche. Celle-ci lui propose de lui transférer les 36 millions d’euros d’avoirs, par ailleurs non déclarés en France, qu’elle détenait déjà au Crédit Suisse depuis vingt-six ans.

 « Or, contrairement aux pratiques du Crédit Suisse qui gérait les avoirs de Mme Chabot selon un mandat de gestion dit « pondérée », la Banque Pasche fait signer à sa cliente un mandat de gestion impliquant « une forte acceptation du risque », soit le mandat le plus spéculatif qui soit, alors qu’âgée de près de 80 ans et payant l’ISF français, Mme Chabot n’avait pourtant nul besoin d’argent. », explique Me Genin.

Une somme amputée de 40 %

 Les descendants, représentés par le fils de Marguerite Chabot, Roland, ont fini par recouvrer une partie de la somme après de nombreuses années de procédure, mais celle-ci a été amputée de près de 40 % vis à vis des 36 millions d’euros d’origine. Il a d’ailleurs, au passage, payé au fisc de lourds arriérés d’impôts.

 Roland Chabot a déposé plainte, à l’automne 2012, « pour démarchage illicite, complicité de fraude fiscale, faux et usage de faux et abus de confiance ». Avec son avocat, il attend une première décision de la Cour d’Appel de Grenoble qui doit intervenir dans les prochains jours, concernant seulement le rejet d’une plainte lors de la première action menée en direction du Tribunal de Commerce de Lyon.

 Pour Me Genin « Roland Chabot , avant toute chose, veut que soit rendu justice à sa mère dont il estime qu’elle a été abusée, méprisée, humiliée.

Devant le Tribunal du Travail monégasque, le 28 avril

La seconde affaire suivie par Me Sophie Jonquet date de décembre 2012. A cette date, trois salariés de la Banque Pasche Monaco jugeant que certaines opérations qu’ils avaient eu à traiter sortaient du cadre légal, contactaient leur direction.

 Craignant de voir un jour leur responsabilité personnelle engagée, ces trois salariés persistent et sont licenciés quelques mois plus tard. Ces « lanceurs d’alerte » selon Me Sophie Jonquet ont aussi déposé plainte, ce qui a amené l’ouverture d’une enquête à Monaco et d’une information pénale confiée au juge d’instruction Pierre Kuentz.

Le 28 avril prochain, la Banque Pasche est convoquée à la requête des trois salariés licenciés devant le Tribunal du travail monégasque pour une première audience.

 On en est là. Ces deux affaires vont suivre-lentement?- leur cours. Elles illustrent en tout cas, le grand état de faiblesse des organes d’investigations en matière financière dans notre pays, à l’heure où les Etats assurent mettre en avant la transparence et la fin du secret bancaire.

 Photo (DL)Me Sophie Jonquet, avocate au Barreau de Marseille, Le Bâtonnier Philippe Genin du Barreau de Lyon et Roland Chabot.