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La Métropole de Lyon et la Ville de Lyon viennent de dévoiler leur feuille de route opérationnelle pour rendre le Rhône et la Saône baignables d’ici 2025, avec l’objectif d’ouvrir une première zone au public en 2026. Derrière ce projet à forte visibilité, souvent perçu comme une promesse de qualité de vie, se cache un chantier d’envergure impliquant de nombreuses entreprises du territoire dans les domaines de l’eau, de l’assainissement, du génie civil et de la mesure environnementale. Un projet urbain structurant, estimé à 2 millions d’euros, qui positionne Lyon comme un démonstrateur européen de la reconquête des fleuves en ville.

Un objectif symbolique, un chantier technique

Rendre les fleuves lyonnais baignables ne se limite pas à une décision politique. Il s’agit d’un processus complexe, piloté par la SPL Lyon Confluence pour le compte de la Métropole et de la Ville, qui mobilise un écosystème d’acteurs publics et privés. Le sujet est d’abord technique : pour autoriser la baignade, les eaux doivent répondre aux critères de qualité de la directive européenne 2006/7/CE, équivalents à ceux d’un site de baignade naturelle surveillé. Cela implique un suivi précis des concentrations en bactéries d’origine fécale, mais aussi la compréhension fine des flux, des rejets, et des mécanismes de contamination ponctuels ou chroniques.

C’est là qu’interviennent les entreprises spécialisées en instrumentation environnementale, modélisation hydraulique, télémétrie et ingénierie sanitaire. Le projet prévoit l’installation de nouveaux capteurs, des mesures régulières sur 14 sites pilotes, et une phase de tests en conditions réelles, notamment à Confluence et au parc des Berges du Rhône. Ces dispositifs vont nécessiter des partenariats techniques avec des bureaux d’études, des opérateurs d’analyse, des spécialistes de la donnée, voire des startups innovantes dans le domaine de l’eau et de la ville intelligente.

Un levier de développement pour la filière eau régionale

La région Auvergne-Rhône-Alpes est déjà un pôle reconnu en matière de gestion de l’eau et de traitement des effluents, avec des entreprises implantées dans l’agglomération lyonnaise comme Saur, Veolia, Serfim, Hydreka ou encore Stereau. Ces acteurs pourraient trouver dans le chantier de la baignabilité un terrain d’expérimentation à grande échelle, à même de valoriser leurs compétences en matière de surveillance temps réel, de gestion des pollutions diffuses ou de pilotage de réseaux unitaires en milieu urbain dense.

En parallèle, les cabinets d’ingénierie et de conseil en urbanisme durable (Artelia, Egis, Biotope, etc.) sont en capacité d’intervenir sur la conception des futurs espaces de baignade, dans une logique d’intégration paysagère, de sécurité et d’exploitation raisonnée. L’annonce de l’ouverture d’une zone test d’ici l’été 2026 sur le site de la darse de Confluence ouvre déjà la voie à des appels d’offres pour des aménagements publics spécialisés.

Un marché émergent au croisement de l’eau et du tourisme urbain

Lyon ne fait pas cavalier seul. Plusieurs métropoles européennes réinvestissent leurs cours d’eau dans une perspective de baignade : Zurich, Berlin, Copenhague ou Paris (à l’horizon des JO) développent des projets similaires. Dans ce contexte, l’agglomération lyonnaise peut devenir une vitrine à l’international. Le savoir-faire local acquis dans la mesure de la qualité des eaux, la gestion des pollutions accidentelles, ou encore l’exploitation de sites mixtes (navigation / baignade / biodiversité) pourrait donner naissance à des solutions exportables, notamment pour les entreprises de la filière hydrotech régionale.

Par ailleurs, la baignabilité crée une nouvelle interface entre les politiques de l’eau et le tourisme urbain. Même si le projet reste porté par les pouvoirs publics, les opérateurs privés du secteur événementiel, de la restauration ou de l’hébergement pourraient être indirectement concernés. La revalorisation des berges comme lieux de baignade modifie les usages, les flux, et in fine, les logiques économiques à l’échelle de certains quartiers. Un effet d’entraînement pourrait émerger sur l’immobilier tertiaire, les commerces de proximité ou l’aménagement d’activités nautiques douces.

Des contraintes fortes qui poussent à l’innovation

Si la promesse est enthousiasmante, les obstacles techniques restent nombreux. L’assainissement en réseau unitaire dans la métropole, les épisodes pluvieux intenses, les rejets des bateaux, ou encore les effluents urbains mal maîtrisés peuvent dégrader rapidement la qualité de l’eau. L’autorisation de baignade devra donc s’appuyer sur des modèles prédictifs robustes, capables de déclencher ou d’interdire l’accès en fonction des conditions réelles.

Ce défi de surveillance dynamique représente une opportunité pour les acteurs du numérique et de la donnée appliquée à l’environnement. Startups, laboratoires de recherche et intégrateurs de solutions IoT peuvent être mobilisés pour construire une chaîne de décision automatisée, alliant capteurs, IA et visualisation temps réel. Une initiative potentiellement duplicable dans d’autres métropoles françaises ou européennes.

Un projet démonstrateur au service d’un urbanisme résilient

Au-delà de la baignade en elle-même, c’est toute une philosophie d’aménagement qui est en jeu. La reconquête des fleuves est un enjeu écologique, symbolique et politique, mais c’est aussi un levier d’investissement et d’innovation pour la ville de demain. Lyon, en engageant ce chantier avec un calendrier clair, une gouvernance partagée et un budget identifié (2 millions d’euros pour la phase actuelle), crée un effet d’entraînement qui dépasse la simple question de l’usage récréatif.

Les retombées attendues — en termes d’attractivité, de bien-être urbain, d’adaptation au changement climatique et de création de valeur — justifient l’implication des entreprises dans cette démarche. Elles sont à la fois prestataires, partenaires, voire copilotes de cette transformation urbaine. Si la baignade en ville est un horizon désirable, c’est aussi une réalité économique à construire, en misant sur l’expertise régionale au croisement de l’eau, de la ville et de la santé environnementale.