Le robot, un outil de compétitivité pour les PMI
Le robot constitue un enjeu de productivité stratégique pour les entreprises industrielles mais des progrès restent à faire pour généraliser sa diffusion dans les PMI. Il faut le rendre encore plus intelligent, plus autonome et plus simple à utiliser.
Comme l’a rappelé Frédéric Helin, chargé de mission à l’ARDI Rhône-Alpes, lors de la table ronde « Robotique intelligente et compétitivité des PME » organisée le 19 mars dans le cadre du salon INNOROBO*, la robotique intelligente se développe dans la région.
Une étude réalisée en 2012 par l’Agence Régionale du Développement et de l’Innovation a démontré l’existence d’une offre constituée de plus de 70 entreprises dans le domaine de la robotique. Le secteur bénéficie de belles perspectives de croissance puisqu’on dénombre en région près de 1 500 acteurs susceptibles de constituer une filière de poids.
Le développement de la robotique intelligente adaptée à la PMI nécessite toutefois de lever des verrous liés d’une part à la bonne expression du besoin par les PME ou, encore, à l’acceptabilité sociale, et, d’autre part, à la capacité des industriels de la robotique à proposer des solutions adaptées à ces besoins.
Ainsi, les acteurs de la robotique et de l’industrie, dont les entreprises innovantes, centres techniques, clusters, pôles de compétitivité, et laboratoires de recherche voient là des opportunités importantes liées au développement de robots polyvalents et collaboratifs, des « cobots », dotés de capacité d’auto-apprentissage leur permettant d’assister les opérateurs dans les taches fastidieuses de l’atelier.
Un moyen de revaloriser les métiers de l’atelier
De ce point de vue, l’entreprise Rhonalpex qui emploie une dizaine de salariés dans la production de tubes, tuyaux et profilés plastiques est tout-à-fait représentative comme l’explique Hervé Caix, son directeur commercial : « jusqu’à présent nous avons beaucoup misé sur l’automatisation de notre parc machines pour améliorer notre compétitivité mais nous devons dorénavant miser sur la robotique si nous voulons continuer à progresser. »
Dans cette perspective, cette PMI a précisément défini ses besoins : « la robotique doit bénéficier aux salariés et à l’entreprise elle-même ». S’agissant des salariés, le robot constitue un moyen de revaloriser les métiers de l’atelier en déchargeant les opérateurs des tâches répétitives et fastidieuses. C’est aussi un bon moyen de réduire les risques de troubles squeletto-musculaires (TMS).
Mais pour Rhonalpex la robotique doit aussi constituer un moyen de faire face aux aléas d’activité : « le robot doit nous permettre de mieux gérer les surcharges de production qui nous obligent à recruter et former dans l’urgence des opérateurs extérieurs. » Hervé Caix se fait une idée précise du robot idéal : « il ne remplace pas l’opérateur mais l’assiste dans son travail. C’est un équipier fidèle et fiable qui le soulage des tâches à faible valeur ajoutée. »
Le Cobot, un robot qui imite l’homme
Les industriels ont des raisons d’être optimistes selon André Montaud, directeur de Thésame car l’offre robotique s’enrichit régulièrement. Selon lui les industriels qui imaginent des solutions robotiques doivent bien vérifier, au préalable, l’organisation interne de leurs ateliers : « un robot n’est pas vraiment efficace si les flux de production sont trop lourds, trop complexes. »
D’une manière générale, ils auront intérêt à s’inspirer de la robotique de service qui a beaucoup progressé ces dernières années : « à l’heure actuelle, certains petits robots mobiles ménagers atteignent un niveau d’intelligence et de performance tout-à-fait remarquable. En exploitant les opportunités offertes par la robotique de service, les industriels ont la possibilité de développer des robots auto-adaptables permettant de flexibiliser leur outil de production. »
De ce point de vue, la « cobotique » propose de nouvelles solutions collaboratives intéressantes pour les PMI. Après une phase d’auto-apprentissage, le « cobot » est capable d’imiter les gestes de l’opérateur ou son comportement en vue de maximiser la performance. Facile à déployer et à utiliser, il se débrouille seul. Il peut donc intervenir dans des locaux déjà existants, sans aucune modification majeure, tout en tenant compte des particularités de l’environnement, à commencer par la position du personnel avoisinant.
L’INRIA accélère dans la robotique collaborative
D’autres voies de progrès se profilent, pour les industriels, grâce aux travaux menés notamment par l’INRIA Rhône-Alpes dans le domaine des systèmes intelligents. L’histoire s’accélère en matière de robotique collaborative selon Crowley qui dirige l’équipe PRIMA (Perception, Reconnaissance, Intégration pour la Modélisation des Activités) : « nous progressons dans le domaine de l’intelligence ambiante qui permet de connecter des services numériques avec des objets du quotidien. »
Sur un modèle inspiré des Fab Lab du MIT, son équipe a initié le projet AmiQual dont l’objectif est d’imaginer et développer de nouvelles solutions intelligentes en regroupant sur un même lieu des moyens de conception, prototypage et assemblage afin de développer des objets « intelligents » (systèmes de vision artificielle, circuits électroniques, machines de fabrication numérisées, capteurs acoustiques, tactiles et visuels permettant de modéliser et prédire l’activité humaine).
Des progrès dans l’assistance au geste chirurgical
Les industriels désireux de développer des solutions robotiques intelligentes ont tout intérêt à exploiter les progrès réalisés par l’informatique médicale selon Philippe Cinquin, directeur du TIMC-IMAG, un laboratoire grenoblois spécialisé dans la recherche en robotique chirurgicale : « d’importants progrès ont été réalisés, ces dernière années, en matière d’assistance au geste chirurgical. Nous avons pu mettre au point des robots spécialisés en fonction des problématiques en présence. »
En relation avec des praticiens « très motivés », les informaticiens ont fait preuve d’un grand pragmatisme : « nous nous sommes d’abord préoccupés des patients et de leurs attentes. La question était de savoir quel type de service la robotique pouvait leur apporter. »
Ils ont ensuite développé des solutions bien adaptées aux pratiques chirurgicales. Pour cela, ils ont mis en œuvre des systèmes informatisés autonomes couplés à d’autres systèmes automatisés de type endoscopes, etc. Le laboratoire est d’ailleurs à l’origine de la société EndoControl, une start-up spécialisée dans le développement de solutions de robotique chirurgicale compactes et mini invasives destinées à la chirurgie endoscopique dont les derniers développement ont été présentés par l’ARDI et la Région Rhône-Alpes à Innorobo.
Des robots capables de se repérer dans leur environnement
La robotique constitue un axe stratégique pour l’entreprise iséroise Sames spécialisée dans les solutions de projection et de pulvérisation électrostatique de peinture pour l’automobile et l’industrie manufacturière. L’entreprise mise plus que jamais sur la robotisation de son parc machines pour se développer et contrecarrer la concurrence des pays à bas coût de main d’oeuvre. Ses activités « Recherche et innovation » et « Industrialisation » regroupent actuellement plus de 40 personnes dont une majorité d’ingénieurs.
Bien qu’elle développe régulièrement de nouvelles solutions robotiques intelligentes, l’entreprise s’estime « limitée » en termes d’autonomie selon Philippe Provenaz, directeur Recherche et Innovation : « notre objectif est de développer des modèles plus autonomes, dotés d’une véritable capacité d’auto-apprentissage.
Grâce à ces robots capables de se repérer dans un environnement donné nous pourrons développer des applications dans de nouveaux domaines. » Sames vise en priorité les secteurs de l’aéronautique (les avions sont encore peints manuellement) et l’énergie (mise en peinture des éoliennes marines, par exemple).
(*) Table ronde animée par François Letellier, responsable du Centre de ressources virtuelles sur l’innovation numérique (Cervin Aconit).
ARDI (Agence régionale pour le Développement de l’Innovation)