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Pour Elisabeth Ayrault, présidente de la CNR, « on pourrait multiplier par 5 le trafic fluvial sur le Rhône ! »

« Si l’on effectuait un bilan global du transport routier, on constaterait qu’il coûte en réalité très cher. Mais pour l’heure, on ne prend en compte que le coût d’exploitation », explique la présidente de la Compagnie Nationale du Rhône (CNR). Elle se désole de voir le transport fluvial régresser sur le Rhône, sauf en 2019 où il a bondi de 8 %. Un retournement ?

Il est vrai que si on n’avait pas eu la mauvaise idée de torpiller le canal Rhin-Rhône dans les années 80, il y aurait plus, voire beaucoup plus de bateaux sur le Rhône.

Malgré tous les efforts de la Compagnie Nationale du Rhône (CNR), le transport fluvial de marchandises n’a pas cessé de régresser ces dernières années, sauf en 2019 où il a connu une belle croissance.

C’est la raison pour laquelle ce regain de trafic constaté en 2019 (+ 8 %) pourrait peut-être constituer l’annonce d’un retournement.

« On peut peut-être y voir un signal intéressant, mais il faut faire très attention et être prudent sur ces chiffres : il faut voir la croissance sur le long terme », tempère Elisabeth Ayrault, la pédégère de la CNR.

Pour cette dernière, le potentiel du trafic fluvial sur le Rhône pourrait être beaucoup plus important. « Le fleuve est aménagé pour accueillir un trafic multiplié par cinq », lance-t-il.

Parmi les raisons de cette désaffection : le fait que l’on ne calcule pas le vrai coùt du transport de marchandises par la route. Pour Elisabeth Ayrault, si on prend en compte toute la chaîne de valeur : la pollution, la santé, la dégradation des infrastructures, les accidents, etc. ; « le transport routier revient en réalité cher, plus cher que les voies fluviales. »

Et de lancer : « Si l’on raisonne sur le coût global, le Rhône s’imposera à terme, comme dans le Nord de l’Europe : il nous faut considérer l’intérêt général de ce fleuve. »

Toutefois pour la patronne de la CNR, il commence à y avoir aujourd’hui, une prise de conscience : « Nous avons multiplié les contacts avec les grands armateurs maritimes ».

L’une des améliorations consisterait à mettre en place des créneaux de déchargement pour le transport fluvial à Fos-sur-Mer, car pour l’heure, ce sont surtout les transports maritimes qui sont privilégiés. Des discussions sont en cours.

Au final, alors que les grands ports du Nord de l’Europe comme Anvers ou Rotterdam envoient près de 50 % de leurs marchandises sur les fleuves, Marseille ne voit transiter sur le Rhône que 6 % des containers.

Les croisières en croissance

Il existe heureusement une exception à cette situation : le développement du transport de personnes sur le Rhône, via le tourisme fluvial et les croisières qui, lui, hormis 2019 où il a stagné, « connaît une belle croissance ».

Et pourtant, pour la présidente de la CNR, « le transport fluvial est ce qu’il a de plus sûr, à la fois pour le transport des matières dangereuses; mais aussi pour les marchandises qui ont de la valeur. On ne compte plus à cet égard le nombre de camions qui, chargés de valeur, disparaissent sur la route… »

Encore faudra-t-il qu’il reste suffisamment de débit à plus long terme au sein du fleure, du fait du bouleversement climatique pour permettre le transport fluvial.

Quel avenir pour le débit du Rhône ?

Les études scientifiques réalisées à la demande de la CNR « donnent une diminution du débit du Rhône  de 10 à 40 % d’ici 20150 », précise Elisabeth Ayrault.

De son côté, Pascal Mailhos, le préfet d’Auvergne-Rhône-Alpes, lors des vœux de la CNR, est allé encore plus loin, évoquant une baisse de débit de 50 % !

L’on sait par exemple que la chaîne de transport sur les grands fleuves (Elbe, Rhin et Danube) germanique a été fortement perturbé en 2018 par la sécheresse…

D’où l’initiative prise par Elisabeth Ayrault qui a créé l’IAGF (Initiatives pour l’Avenir des Grands Fleuves) qui réunit les acteurs des grands fleuves dans le monde), pour défendre lesdits grands fleuves.

« On constatait jusqu’à présent que dans les discours autour du changement climatique, les fleuves n’existaient pas. Nous voulons leur donner de la visibilité… »