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Smart-grid : Lyon et Rhône-Alpes veulent prendre une longueur d’avance

« Greenlys », « Smart Lyon » ou le projet japonais NEDO : il va falloir s’habituer à ces vocables qui illustrent la révolution smart-grid dont Lyon et Rhône-Alpes constituent l’épicentre hexagonal. Les investissements nécessaires s’élèvent à 140 millions d’euros. Ils s’appuient sur la pose par ERDF à titre expérimental de 200 000 compteurs intelligents Linky à Lyon et dans l’Ouest lyonnais et sur la présence en Rhône-Alpes des principaux acteurs : outre EDF, Schneider-Electric, Alstom, Nexans, une poignée de PME, des universités et centres de recherche. Avec à la clef des retombées environnementales et industrielles qui pourraient se révéler considérables.

Faute de trouver une matière première abondante, sécurisée et bon marché, le monde s’est intéressé à la révolution internet pour optimiser sa consommation énergétique, et notamment électrique : ce que l’on appelle désormais le smart-grid.  

Il s’agit en fait d’un réseau de distribution d’électricité «intelligent» qui utilise des technologies informatiques pour optimiser la production et la distribution et mettre en relation l’offre et la demande entre les producteurs et les consommateurs d’électricité. Et surtout, avec le développement des énergies durables, d’assurer la sécurité de fonctionnement du réseau en présence des productions décentralisées intermittentes et aléatoires que sont le solaire et l’éolien.

Les perspectives de ce marché naissant sont considérables. Le parlement européen souhaite que tous les Etats membres installent des compteurs intelligents dans chacun des 27 pays de l’UE : un investissement qui pourrait s’élever selon certaines sources à 80 milliards d’euros.

Selon le Pike Research Group, les investissements smart-grid sur la période 2008 à 2015, dans le monde pourraient s’établir à près de 200 milliards de dollars.

Selon Laurent Valet, directeur d’une PME lyonnaise, EnergIT, spécialisée dans le green IT (*), « la France qui a connu longtemps un marché de l’énergie monopoliste a pris du retard dans les smart-grid, par rapport notamment aux Etats-Unis où la production et la distribution d’énergie est beaucoup plus décentralisée. »

Dans ce cadre hexagonal, Lyon et Rhône-Alpes se veulent plus en phase avec cette révolution énergétique qui ne fait que démarrer. Les enjeux industriels vont rapidement passer par des normes dans l’élaboration desquelles il est indispensable d’être impliqué si l’on veut compter au plan mondial.

« En Rhône-Alpes existe une volonté forte de développement des smart-grid du fait de la pluralité des énergies : éolien, photovoltaïque, hydraulique et nucléaire et de la présence de nombreux acteurs comme ERDF, Schlumberger, Schneider Electric, une poignée de PME, ainsi que des SSII comme HP ou IBM  », constate Laurent Valet . Ce n’est donc pas un hasard si Lyon et onze communes de l’Ouest lyonnais ont constitué (avec Tours) l’un des deux territoires français où a été expérimenté le compteur électrique intelligent Linky, installé par ERDF chez près de 200 000 foyers.

ERDF n’attend plus que le feu vert de la Commission de Régulation de l’Energie (CRE), l’autorité administrative indépendante pour passer de l’expérimentation à la pose de pas moins de 35 millions de compteurs en France ! A 240 euros pièce le compteur Linky, cela représente un chiffre d’affaires de 8 milliards 400 millions d’euros.

Avant même cette méga-opération qui va prendre des années, il s’agit d’aller plus loin dans les applications concrètes pour préparer l’avenir et rattraper le retard français. ERDF a répondu à un appel à manifestation d’intérêt de l’Ademe visant à installer un démonstrateur de smart-grid à Lyon et à Grenoble, baptisé « Greenlys ».

Pour ce faire, un consortium a été mis en place : il rassemble Schneider Electric, l’INP-Grenoble, GdF-Suez, ainsi que GEG (Gaz et Electricité de Grenoble, réseau de distribution).

« L’expérimentation va porter sur 500 compteurs résidentiels et tertiaires, ainsi que des producteurs d’électricité photovoltaïque et des systèmes de recharge de véhicules électriques. Il s’agit de voir comment on peut coupler la production décentralisée d’électricité avec la consommation locale», explique Bruno Guerpillon, d’ERDF, chef de projet. Un volet sociologique accompagne cette expérimentation : il s’agit d’appréhender le niveau d’acceptation des clients en matière de consommation régulée. C’est bien de mettre au point des systèmes sophistiqués, mais encore faut-il savoir si le consommateur et d’accord pour se les approprier !

Il s’agit là d’un investissement de 40 millions d’euros. Le siège de ce démonstrateur devrait être installé dès l’année prochaine à Lyon-Confluence.

Mais ERDF et ses partenaires entendent aller encore plus loin : un second projet de démonstrateur encore plus large et au budget de 100 millions d’euros, cette fois, devrait aussi bénéficier du feu vert de l’Ademe pour démarrer début 2012 : Smartlyon. Il s’agira là d’un démonstrateur développé sur une échelle beaucoup plus vaste: 10 000 clients, tout en impliquant pas moins de quarante partenaires : producteurs d’électricité, distributeurs, mais aussi fabricants de produits électro-ménagers qui devront être dotés de puces pour pouvoir être pilotés à distance. Un projet dont le chef de file est cette fois EDF.

Mieux encore : cet éco-système régional très smart-grid a aussi attiré les Japonais qui, suite à un partenariat avec le Grand Lyon ont aussi lancé le projet NEDO (l’équivalent japonais de l’Ademe) qui vise cette fois à développer la gestion énergétique à l’échelon d’un quartier, en l’occurrence celui de la Confluence. Le projet d’ampleur européenne prévu pour durer cinq ans, mêle la gestion dynamique des bâtiments et celle de la charge d’une flotte de véhicules électriques, le tout couplé à des panneaux photovoltaïques.

Pour Bruno Guerpillon, d’ERDF, « C’est encourageant. Lyon et le Grand Lyon ont bien pris la mesure de la révolution qui est en train de s’opérer. Ils entendent bien faire de Lyon la ville la plus avancée d’Europe en matière de smart-grid. Et de le faire savoir… »

(*)Eco-techniques dont le but est de diminuer l’impact de l’informatique et des TIC sur l’environnement.

Photo (DR) : Le nouveau compteur Linky, plus petit, mais aussi beaucoup plus intelligent.