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Erai : l’immense gâchis

Rassembler sous une même structure, en l’occurrence, celle de l’Ardi (Agence régionale pour le développement et l’innovation) l’international et l’innovation avait un vrai sens. D’autant qu’un 3ème « i » était associé : l’investissement, grâce au concours de la Banque Publique d’Investissement.

 Les élus régionaux n’ont pas, lundi 18 mai en séance plénière, su saisir cette chance pour l’économie régionale. Sans voter pour, il aurait suffi que le groupe UDC (UMP/Centre) du Conseil régional s’abstienne simplement pour que la délibération proposée par l’exécutif régional de reprise d’une bonne part d’Erai, soit acceptée.

 Ce qui aurait évité à l’administrateur judiciaire la très probable liquidation judiciaire d’Erai qui se profile et le licenciement, sauf grosse surprise, des 126 salariés de ce qui constituait le bras armé à l’international de la Région Rhône-Alpes. Sans oublier l’arrêt brutal des contrats en cours dans le monde entier, entre les PME de la Région et Erai que cette liquidation va provoquer.

 Or, en l’occurrence, la politique l’a emporté sur l’économie. Erai ou ce qui devait en subsister a été victime de la proximité des élections régionales programmées pour le mois de décembre prochain.

 Faire trébucher Jean-Jack Queyranne

 Il s’agissait tant pour l’UDC (UMP/Centre) que des Verts d’EELV de faire trébucher sur ce dossier l’exécutif et son président, Jean-Jack Queyranne qui se présente pour un troisième mandat. Le dossier aurait été présenté à une autre période, le sort d’Erai aurait peut-être été autre.

 Il s’agit là d’un immense gâchis : voulu il y a vingt-cinq ans par un chef d’entreprise et non des moindres, Alain Mérieux, avec, à son conseil d’administration des représentants d’un large pan du monde économique, Erai le bras armé de la région Rhône-Alpes à l’international avait peut-être de nombreux défauts et un président, Daniel Gouffé, beaucoup trop omnipotent, mais cette structure a joué, tout au long de son existence un vrai rôle dans l’accompagnement des PME de la région à l’international.

 Lyon-entreprises a relaté en son temps les témoignages de gratitude de nombreux décideurs rhônalpins : ils sont nombreux, très nombreux.

 Ceci dit, on comprend que les élus régionaux aient, au vu des dérives constatées et les 8 millions d’euros de trou affichés, eu envie de « se payer Erai ».

 Un coût de 40 millions d’euros depuis le début du mandat

 Qu’il s’agisse des 40 millions d’euros qu’a coûté Erai depuis le début du mandat de Jean-Jack Queyranne dont 10 millions d’euros pour le seul pavillon de Shanghai, comme le souligna l’élu vert Jean-Charles Kohlhaas.

 Qu’il s’agisse de l’augmentation de la masse salariale de 500 000 euros « alors que la structure était sans doute déjà en cessation de paiement » selon le même élu écologiste.

 Voire encore des dérives dues à des salaires excessifs pour une telle structure privée assurant une forme de service public : 143 000 euros par an, pour le directeur général, selon le même élu.

 Du côté du groupe UDC à la région (UMP/Centre), les flèches furent décochées sur les frais de déplacement de 20 à 40 000 euros par an pour les cadres, sur « l’absence de transparence, sur les doutes sur la fiabilité des comptes : la date de cessation de paiement remonte au moins à…2010 », selon l’élu UDC Michel Voisin.

 « Dans ce dossier, le responsable, c’est vous, Jean-Jack Queyranne. Pourquoi avoir couvert une gouvernance opaque ? Pourquoi avoir caché jusqu’en janvier 2015 les audits d’ERAI ? », a de son côté lancé Jérémy Thien, un autre élu UDC.

 Mais fallait-il pour autant au vu de ces critiques, jeter le bébé avec l’eau du bain ?

 Assurément non, car le fruit de ce travail de vingt-cinq ans et toutes ces PME qui se retrouvent le bec dans l’eau du jour au lendemain, vont avoir un prix économique que l’on va vite constater. Même si les entreprises privées qui assurent elles aussi l’accompagnement à l’international des PME se positionnent déjà pour compenser la disparition d’Erai.

 Que les responsabilités soient clairement définies

Il fallait bien sûr mettre sur la place publique les errements d’Erai, et sans doute beaucoup plus tôt, mais sans pour autant supprimer d’un trait de plume ce que cette structure a apporté à l’économie régionale.

 Maintenant, il faudra que les responsabilités à l’origine de ce gâchis-et elles sont nombreuses-, soient clairement définies.

 La justice qui au vu des éléments dont elle dispose pourrait procéder à des poursuites pénales « pour soutien abusif », notamment, pourrait constituer l’élément déclenchant.