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La première privatisation des aéroports régionaux, actuellement en cours, celle de Toulouse-Blagnac, suscite à la fois des inquiétudes, mais laisse aussi émerger quelques lueurs d’espoir.

Après la remise, vendredi dernier, des offres formelles de reprises, sur les sept candidats pour entrer au capital de l’aéroport de Toulouse qui s’étaient manifestés – deux français et cinq étrangers – trois restent en lice.

A savoir, deux Français, « Aéroports de Paris, associé à l’assureur Predica-Crédit Agricole » ; mais aussi « Vinci, associé à CDC Infrastructures et EDF Invest ».

Un consortium étranger, associant le groupe aéroportuaire canadien SNC-Lavalin à des investisseurs chinois proposerait même l’offre la plus alléchante, à hauteur de 300 millions d’euros.

D’après d’autres observateurs, c’est le trio Vinci/CDC Infrastructure/EDF Invest qui tiendrait la corde.

Le niveau des prix, pour les 49,9 % du capital sur les 60 % appartenant à l’Etat mis en vente,  s’élèverait donc en haut de la fourchette : autour de 300 millions d’euros.

Cette privatisation est observée de très, très près en Rhône-Alpes car le suivant sur la liste est l’aéroport de Lyon-Saint Exupéry, comme vient de le confirmer Emmanuel Macron, ministre de l’Economie.

Saint-Ex : 400/450 millions d’euros pour l’Etat ?

 Et là, ce serait encore plus juteux encore pour les finances de l’Etat, mais plus onéreux pour envisager une solution régionale : l’opération pourrait rapporter 400, voire 450 millions d’euros au gouvernement qui cherche tous les moyens à activer la pompe à finances.

 Une telle somme s’explique facilement. L’aéroport de Toulouse affiche 7,5 millions de passagers, celui de Lyon-Saint Exupéry : 8,5 millions. Il faut ajouter dans la corbeille les importantes réserves foncières qui permettront à l’avenir à l’aéroport de se développer et que l’on ne trouve pas à Toulouse ; ainsi que sa filiale, l’aéroport d’affaires de Lyon-Bron, l’un des plus importants de France, également dans la corbeille.

Bon connaisseur du transport aérien, Philippe Grillot, l’ancien président de la CCI de Lyon, évincé, avait proposé en son temps une solution régionale, à laquelle il croyait beaucoup.

Avec 25 % du capital, la CCI est en effet l’actionnaire-clé du dossier, aux côtés du Département du Rhône (5 %), de la Région Rhône-Alpes (5%) et du Grand Lyon (5 %), l’Etat possédant pour l’heure le reliquat, soit 60 %.

 Un pool d’investisseurs régionaux ?

Ces trois collectivités, plus la CCI de Lyon pèsent ensemble 40 % du capital. Monter à un peu plus de 50 % pourrait représenter un investissement de 40 à 50 millions d’euros. Impossible à l’heure où les CCI s’attendent à une chute de leur budget de 37 % au cours des trois prochaines années. A moins de vendre les bijoux de la couronne, ce qui signifierait pour la CCI de Lyon la privatisation d’EM Lyon ou du musée des Tissus. Si cette hypothèse était envisagée, elle se heurtera à des oppositions fortes.

Pour l’heure, Emmanuel Imberton, l’actuel président de la CCI de Lyon consulte beaucoup avant d’indiquer, a-t-il annoncé, début décembre, quel sera le choix de l’instance consulaire.

« La CCI entend pleinement jouer son rôle d’actionnaire »

L’homme actuellement au cœur ce dossier réaffirme seulement pour l’instant que « la CCI de Lyon entend jouer pleinement son rôle d’actionnaire à 25 % de la SA Aéroports de Lyon. »

 Mais il précise : « La CCI de Lyon observe avec attention l’ouverture du capital de l’aéroport de Toulouse-Blagnac. Les propositions nombreuses, françaises et internationales, illustrent la dimension fortement stratégique du sujet. »

Mais on ne trouve pas, pour l’heure dans ses propos, l’esquisse d’une solution régionale.

« Notre seul objectif est de défendre les intérêts des entreprises et d’agir pour que notre aéroport continue son déploiement au service du développement économique, des activités internationales des entreprises et de l’attractivité du territoire de Lyon et de Rhône-Alpes », conclut-il.

Un appel de fonds pour l’aéroport Lyon-St-Ex à travers le crowdfunding ?

La privatisation devrait être officiellement lancée par le gouvernement à la mi-décembre. Le temps presse.

Car c’est désormais une certitude : le ticket sera élevé, très élevé.

Il est une autre voix que l’on n’entend pas du tout pour l’instant, celle des chefs d’entreprises membres du « Club des entrepreneurs des aéroports de Lyon » que préside Bruno Allenet (GDF-Suez). Sont-ils prêts à mettre la main à la poche pour conserver l’aéroport dans le giron régional ? Pour l’heure, Bruno Allenet attend de voir quel choix fera la CCI de Lyon, avant de se prononcer.

De deux choses l’une. Ou, comme à Toulouse, la CCI et les collectivités locales pèsent de tout leur poids pour que le processus de privatisation soit mené de concert avec l’Etat et pour que les intérêts régionaux, c’est à dire un développement de l’aéroport à l’international, soient préservés.

Soit la privatisation se fait à la hussarde et l’aéroport, risque-c’est une possibilité à ne pas exclure- d’être absorbé par Aéroports de Paris (ADP) qui n’aura pas pour priorité première son développement, tous les observateurs en conviennent.

La partie qui va s’engager va donc s’avérer cruciale pour l’avenir de Rhône-Alpes et de son aéroport.

Une autre possibilité testée à Toulouse se profile cependant. La plateforme de crowdfunding Wiseed a lancé dans le cadre de la privatisation de Toulouse-Blagnac, un appel à investisseurs privés pour le rachat des 10 % qui permettraient aux acteurs locaux d’avoir la majorité dans le futur capital de la plateforme aéroportuaire.

Une idée peut-être à reprendre si l’on sait que justement la CCI de Lyon vient de lancer sa propre plateforme de crowdfunding, baptisée «Crowd Avenue » «  avec le même Wiseed !

Beaucoup de scénarios peuvent s’échafauder, mais il paraît essentiel que pour chacun d’entre eux, la CCI de Lyon, c’est-à-dire le monde économique régional, conserve un rôle majeur dans cette privatisation. Mais pour ce faire, il va falloir assurément jouer groupé…