Réforme : Les Régions retrouvent enfin le devant de la scène
Si les actes suivent les paroles de Manuel Valls, lors de son discours devant l’assemblée nationale la semaine dernière, les Régions dont se sont méfiés la plupart des précédents gouvernements devraient trouver la place qui devrait être la leur.
Le nouveau premier ministre a annoncé deux évolutions toutes aussi importantes : la division par deux du nombre des régions pour faire en sorte que celle-ci bénéficient enfin d’une taille critique ; et la fin des départements, une véritable Arlésienne, il faut bien le reconnaître.
Dans les deux cas, il a vu juste. Le fait régional monte partout en Europe. Et ce, pour une bonne raison : il s’agit du bon échelon de coordination, entre espaces urbains et ruraux. C’est au niveau des Régions que se joue la compétition internationale. L’Etat omnipotent est mort.
Mais aussi pour une raison plus pragmatique, encore : parce que la Commission européenne a une politique régionale, via la distribution de ses fonds.
Ainsi, que la Bourgogne se marie avec la Franche-Comté ou que l’Auvergne convole avec le Limousin, paraît parfaitement logique. Sans parler de la Haute et de la Basse Normandie qui auraient dû se pacser beaucoup plus tôt !
Il ne faut pas oublier que nos régions françaises déjà faibles démographiquement, comme se plaît souvent à le rappeler Jean-Jack Queyranne, ont des budgets sept à dix fois inférieurs à ceux du Bade-Wurtemberg, de la Lombardie, ou de la Catalogne. Lorsqu’il se rend chez ces trois régions sœurs de Rhône-Alpes, il n’a absolument pas l’impression d’être sur un pied d’égalité.
Et pourtant, la région Rhône-Alpes devrait être l’une des rares à ne pas fusionner avec une autre car elle possède déjà, elle, la taille critique : rappelons qu’elle est grande comme la Suisse et peuplée comme le Danemark. Deuxième région française, elle figure au sixième rang européen en termes de Produit Intérieur Brut.
Les Alpes de Haute-Provence, la Saône-et-Loire ou la Haute-Loire dans Rhône-Alpes ?
Elle pourrait éventuellement accueillir un département comme celui des Alpes de Haute-Provence, ce qui aux côtés des deux Savoies aurait une certain cohérence.
Jean-Jack Queyranne trouverait aussi de son côté une certaine logique dans l’intégration à Rhône-Alpes de deux départements qui sont dans l’attraction lyonnaise : « la Saône-et-Loire, il suffit de voir la ligne ferroviaire Lyon-Mâcon, l’une des plus fréquentées de la région ou la Haute-Loire, plus tournée vers la Loire et vers Lyon que vers l’Auvergne. »
Si la question de la taille critique des régions françaises a de bonnes chances d’être réglée, quid des départements ?
Les intercommunalités bénéficiaires des compétences des Départements ?
Il n’est que temps de dessiner la France administrative du 21ème siècle. Pour Jean-Jack Queyranne, favorable à la suppression des départements, ceux-ci reflètent la France rurale et ne sont plus en phase. Il a en cela parfaitement raison. Leur budget est consacré majoritairement au fonctionnement : ce ne sont plus des moteurs, ni administratifs, ni économiques.
Pour Jean-Jack Queyranne, ce ne sont pas aux Régions de se partager les compétences des Départements, une fois leur suppression actés. Pour lui, ces compétences, essentiellement sociales, devraient, aller vers les intercommunalités destinées, estime-t-il, à prendre un poids grandissant. Cela signifie aussi que les municipalités telles qu’on les connaît sont amenées peu à peu à se dissoudre.
Mais il faut en avoir conscience, la suppression des Départements annoncée par Manuel Valls risque d’être une autre paire de manches. On l’a vu lors des premières levées de boucliers qui se sont exprimées. Le Sénat, miroir pour une bonne part de la France rurale, devrait constituer à cet égard un frein puissant.
C’est la raison pour laquelle la nomination d’André Vallini, lui même président d’un Département, celui de l’Isère, comme ministre de la réforme territoriale apparaît comme un choix très malin. Il s’agit d’un homme concret et pragmatique.
Même Michel Mercier…
Même Michel Mercier, ancien président du Département du Rhône, d’ailleurs ne paraît pas opposé à la suppression des Départements. D’autant que la situation se complexifie dans le Rhône avec un nouvel échelon, fusion du Grand Lyon actuel et la partie du Département du Rhône située sur son territoire qui doit voir le jour le 1er janvier 2015 : la Métropole.
Comment les Régions vont-elles s’articuler avec ces futures Métropole sans qu’il y ait collision entre leurs compétences respectives ; mais aussi avec les communautés d’agglomération, là où elles existent encore ? Le Législateur va devoir faire des choix…clairs.
Il faut espérer qu’il mette enfin de la logique dans ce millefeuille auquel plus personne ne comprend plus rien et qui coûte cher à la Nation.
Le plus tôt sera le mieux, mais il ne faut pas se faire d’illusion : les oppositions à la réforme vont aller grandissantes. L’ancien premier flic de France ne devra pas flancher : il donne à la France une occasion historique de se réformer. Il faut la saisir.