Vers une troisième révolution industrielle ?
Dans ce livre l’auteur montre comme la rencontre de la technologie d’Internet et des énergies renouvelables peut développer une dynamique qu’il appelle « la troisième révolution industrielle », susceptible de créer des dizaines de millions d’emplois dans le monde.
Jeremy Rifkin, l’auteur de ce livre (*) rappelle que les deux premières révolutions industrielles sont nées de la conjonction du charbon et du moteur à vapeur pour la première ; du pétrole et de l’automobile pour la seconde. L’énergie verte reliée à la Toile serait pour lui la troisième.
Le monde qu’il décrit ne ressemble en rien au monde que nous connaissons. Pour que cette nouvelle révolution industrielle qu’il décrit réussisse, il faut que des centaines de millions de personnes produisent leur propre énergie verte à domicile, au bureau, à l’usine et la partage sur un « Internet de l’énergie ».
Elle ne peut que se concevoir, explique-t-il, qu’en cassant les cadres du fonctionnement pyramidal et centralisé de la société telle que nous la connaissons pour le changer en un pouvoir autonome, latéral. Bref, faire migrer la société vers ce qu’il appelle le « capitalisme distribué », amenant « un changement radical dans la répartition du pouvoir économique, politique et social au 21ème siècle… »
L’homme qui décrit ce nouveau monde n’est pas un écologiste perdu au fin fond de l’Aveyron ou un utopiste béat. Il est maître de conférence à la Wharton school de l’Université de Pensylvannie aux USA et président de la Fondation sur les tendances économiques.
Il est suffisamment pris au sérieux pour conseiller, avec son équipe, non seulement les villes de Rome, de San Antonio au Texas ou d’Utrecht aux Pays-Bas, mais aussi l’Union Européenne.
Sa thèse ? Que l’Europe est beaucoup mieux outillée que les Etats-Unis pour être précurseur de cette troisième révolution industrielle.
Selon lui le déclenchement de ce changement profond qui devrait redonner de la croissance à nos économie dépend de cinq facteurs qui doivent être mis en jeu simultanément. Au départ, le passage, bien sûr, aux énergies renouvelables ; la transformation du parc immobilier de tous les continents en un ensemble de microcentrales énergétiques ; le développement de l’hydrogène pour le stockage de cette énergie dans chaque immeuble et dans l’ensemble des infrastructures ; l’utilisation de l’Internet pour transformer le réseau électrique en inter-réseau de partage de l’énergie fonctionnant comme le Web ; et enfin le passage de la voiture thermique à la voiture électrique ou à pile à combustible.
On comprendra que ce futur ainsi décrit nécessite l’implication de l’Etat pour l’impulsion, mais aussi celui des chefs d’entreprise et des citoyens. Toute une société doit être mise en mouvement.
Sans aller très loin, on aperçoit en filigrane les prémisses de cette vision dans les différentes expérimentations en cours dans ce laboratoire de l’avenir que constitue le quartier de la Confluence à Lyon avec les projets Greenlys (France) ou NEDO (Japon).
On peut trouver cette vision trop optimiste, voire utopiste, mais elle a au moins le mérite de répondre de manière cohérente aux trois crises que nous vivons actuellement : économique, écologique et politique. Pour lui, la différence n’est plus vraiment entre droite et gauche, mais autour d’un nouveau clivage entre « centralisé et autoritaire » et « distribué et coopératif ».
Une certitude est en train de se faire jour chez les décideurs du monde entier : l’augmentation du prix du pétrole va constituer un frein majeur à la croissance. Actuellement, malgré la crise, il atteint des sommets. Il suffirait que le PIB mondial accélére pour qu’il s’envole à nouveau.
Quoi qu’on veuille, nous avons passé ou allons passer le cap du « pik oil », c’est à dire la période ou la production ne peut augmenter, du moins aussi vite que la demande, avec à la clef, une flambée automatique de l’or noir Allons-nous devoir vivre une période de stop and go préjudiciable à la croissance ?
La troisième révolution industrielle prônée par Jeremy Rifkin a le mérite de répondre à cette véritable épée de Damoclès et de montrer une voie à suivre.
Il a en tout cas le mérite de nous faire réfléchir car lorsque nous regardons autour de nous, on constate que nous sommes en train d’entrer dans cette nouvelle ère. Sans la voir. Autant changer d’époque les yeux ouverts…
(*) « La troisième révolution industrielle » de Jeremy Rifkin, édition « Les liens qui libérent ».