Toute l’actualité Lyon Entreprises

Pénurie et inflation : la coopération agricole d’Auvergne-Rhône-Alpes tire la sonnette d’alarme
D’une crise à l’autre l’agriculture est mise à mal. Lorsque le COVID a engendré une inflation des intrants la crise en Ukraine quant à elle touche les entreprises de transformation gourmandes en énergie. Plus largement le secteur de l’alimentaire connait 0,8% d’inflation quand celle-ci atteint 6 voire 7% pour certaines catégories.

A tous ceux qui invoquent le blocage des prix pour faire face aux crises, le président de la coopération agricole d’Auvergne-Rhône-Alpes, Patrice Dumas, répond « aucun blocage des prix n’est envisageable, ceux-là sont irraisonnable. Il ajoute que « la souveraineté alimentaire a un coût et que ce n’est pas aux agriculteurs de payer mais à l’État ».

Guerre en Ukraine une crise plus globale

La France est certes 1er exportateur mondial de semence mais pour ce qui est des engrais l’Ukraine et la Russie sont les 1ers, ce qui provoque une incertitude. Par ailleurs, 50 % à 70 % des exportations mondiales d’huile et tourteaux de tournesol proviennent d’Ukraine. Avec 85 % de la commercialisation européenne d’huile de tournesol et 55 % de celle de colza venant d’Ukraine l’Europe doit s’attendre à une forte pénurie.

Quid de la relocalisation et de la souveraineté alimentaire ?

Les crises ont de bénéfique les remises en question et les diagnostics. Parmi le top 3 des relocalisations urgentes, Jean de Balathier, directeur de la coopération agricole Auvergne Rhône-Alpes, place les oléagineux tels que le colza et le tournesol qui étaient en baisse significative ces dernières années. Suivi du blé dur qui est en très forte perte de vitesse. En troisième position arrive l’engraissement de bovins « nous produisons des veaux que nous exportons en Italie ou en Espagne où ils se font engraisser alors qu’on manque d’animaux pour nos abattoirs » affirme Jean de Balathier. A noter que ces baisses sont dûes au manque de rentabilité et du delta entre la PAC et les charges de production.

La coopération agricole AURA met le doigt sur un sujet en révélant que la France est 6ème exportateur alimentaire et agroalimentaire mais en produits bruts qu’elle réimporte finit et transformés. La pomme de terre va en Belgique pour ensuite revenir sous forme chips. Gros producteur de fromage avec plus de 200 variétés la France importe pourtant du fromage (33%) pour l’industrie agroalimentaire.

La réorientation des cultures et des productions serait une solution envisageable pour 2023 mais pour 2022 il est trop tard. La réorientation n’est à elle seule pas la seule solution menant à l’autonomie alimentaire. La souveraineté alimentaire termes à la mode ces derniers temps et volonté légitime des consommateurs n’est possible selon Jean de Balathier que dans le cadre d’une politique publique et de l’acceptation par les citoyens d’une revalorisation des produits alimentaires. La souveraineté alimentaire a un coût et c’est en moyenne 10% des produits alimentaires.

Pour atteindre la souveraineté il faudrait produire des protéines végétales utiles à l’alimentation des animaux mais aussi des viandes dont la volaille pour laquelle nous sommes dépendant des importations à 35%, ovine à 44%, porcine à 27% et bovine à 22%. En ce qui concerne les fruits nous importons 41% et 22% en légumes sans compter les produits exotiques.

L’ultra-libéralisme européen, pourvoyeur de crises

D’après la coopération agricole l’ultra libéralisme européen provoque une spéculation sur les matières premières sans limite. Cette dernière s’illustre aujourd’hui en période de guerre en Ukraine ou 10% des engrais azotés ont été retiré du marché par la Chine. La même qui avait, en sortie de crise COVID, aspirer un grand nombre d’intrants et fait de la rétention d’autres.

Et pourtant, la France pourrait sortir son épingle du jeu, avec un taux d’auto-approvisionnement de 200% en blé tendre dont 50% est exporté et 150% en maïs dont 40% est exporté. La France ne manquera donc ni de blé ni de maïs durant cette crise Ukrainienne le blé servant à l’alimentation humaine et animale tandis que le maïs sert à l’alimentation des animaux. L’Ukraine et la Russie représentent 42% des exportations mondial de blé.

La crise pourrait donner des opportunités supplémentaires à la France à l’exportation vers les pays très dépendants des céréales ukrainiennes et russes comme l’Egypte, Algérie ou encore le Liban pour ne citer qu’eux. Mais encore une fois cela aurait des effets négatifs sur notre marché intérieur et entrainer une baisse de disponibilité et très forte augmentation pour les éleveurs.

50% de la population agricole à renouveler d’ici 7 ans

Au dernier recensement la France comptait 410 000 agriculteurs dont 48 500 agriculteurs soit 12% en Auvergne Rhône-Alpes qui produisent 8% de la production nationale soit 6 milliards d’euros. Ce chiffre augmente à 10 milliards et représente 12% de la production nationale en ce qui concerne la production agroalimentaire. Derrière chaque production de notre région il y a une filière de transformation avec une part importante de produits sous signes de qualité (IGP, AOP, bio). La part des surfaces en bio est de 10.5% en AURA contre 9.5 en moyenne nationale. En Auvergne Rhône-Alpes nous produisons pour 1,2 milliards d’euros de lait de vache, pour 1 milliards d’euros de viande bovine et 600 millions d’euros de vin.

La spécificité du territoire à 67% en zone de montagne ou à handicaps naturels fait que nous possédons une grande part d’élevage les cultures céréalières étant dans des zones de plaines ou de vallée.

L’agriculture soumise au 4 vents

Une autre crise, très peu relayée, celle de la grippe aviaire qui sévit en ce moment dans l’ouest du pays principale région de production avicoles (œufs et volailles) aura des effets inflationniste.