Départ, démission : l’exécutif écologiste de la Métropole de Lyon bousculé sur son flanc culturel
Dans le domaine des transports, normal, c’était attendu ; mais dans celui de la culture ? On ne s’attendait pas à ce que ce soit aussi dans ce domaine que l’actuel exécutif écologiste de la métropole soit bousculé. La transformation des anciennes usines Fagor-Brandt en site d’accueil et de maintenance du Sytral a provoqué la démission de François Bordry, président des Biennales de Lyon (Danse et art contemporain) et des critiques à l’intérieur même de la majorité. Même si aucun déclaration de la sorte a été émise, on ne peut s’empêcher d’y rapprocher l’annonce du départ de Dominique Hervieu, directrice artistique de la Biennale de la Danse pour les JO de Paris.
C’est un communiqué plutôt virulent, émanant de l’ancien président régional de VNF (Voies Navigables de France) à Lyon : il a fait l’effet d’une lourde pierre lancée dans le Rhône, avec des cercles concentriques à n’en plus finir.
Dans ce communiqué sous forme de pavé dans la mare, paru vendredi 17 décembre, le président des Biennales de Lyon, François Bordry annonce son départ. « La Métropole de Lyon conduit une politique marquée par une absence totale de concertation avec les associations et les institutions chargées de mettre en œuvre l’action culturelle », dénonce-t-il.
Et d’ajouter en forme de menace : « Les élus se réveilleront sans doute, mais il sera trop tard, le jour où ils s’apercevront que la capitale, toujours à l’affût d’une faiblesse en province, pourra rapatrier à Paris, enfin, la « grande Biennale française »
Si François Bordry claque la porte, la raison tient au fait qu’il a appris, en septembre dernier, non pas par l’exécutif, mais…par la presse, la délocalisation de la Biennale des anciennes usines Fagor-Brandt dans le 7ème arrondissement de Lyon, mais aussi des autres manifestations culturelles ou gastronomiques qui s’y déroulent.
On le sait, comme Lyon-Entreprises l’avait annoncé, au grand dam des milieux culturels, la Métropole de Lyon avait alors pris la décision fort controversée de transformer les usines qui accueillent de grandes manifestations culturelles en entrepôt pour ses véhicules TCL. Plus précisément, il s’agira d’un « centre de remisage et de maintenance » pour les TCL et un dépôt de tramways.
Trouver un lieu d’accueil en 2023
Les Biennales, comme les Nuits Sonores, devront trouver un autre lieu d’accueil en 2023.
Les travaux d’adaptation du site débuteront en 2024, la mise en service du remisage en 2026, et celle du centre de maintenance en 2028.
Cette absence de considération estime-François Bordry l’a donc fait sortir de ses gonds, ce qui a un sens symbolique fort, François Bordry étant, en tant que président de la Biennale de Lyon et le big boss de la Biennale de la Danse et de celle d’Art contemporain. Une démission donc au retentissement national.
Mais ce n’est pas tout puisque Nathalie Perrin-Gilbert, l’adjointe à la culture à la Ville de Lyon, elle-même, de manière plus soft cependant, a demandé que le président de la Métropole, Bruno Bernard, « révise sa position » à propos de l’avenir de ces anciennes usines Fagor-Brandt.
« Les groupes Lyon en commun et Métropole en commun demandent que le président de la Métropole (Bruno Bernard) révise sa position et permette au site de l’ancienne usine Fagor-Brandt de garder des espaces dédiés à la création et à l’expérimentation artistique », a ainsi souligné lors d’une séance du conseil municipal celle qui siège dans la même majorité que Bruno Bernard à la Métropole de Lyon.
“En totale contradiction avec les promesses faites…”
Les membre du parti présidentiel “En Marche” de la Métropole de Lyon sont aussi à cette occasion monté au créneau « Cette décision est en totale contradiction avec les promesses de campagne des écologistes, promettant de maintenir une activité sur le site et d’en faire un lieu dédié à l’artisanat local et au made in Lyon ! »
La Droite enfin n’a pas manqué de participer au flot de critiques : « Cette démission, tout comme le départ de Dominique Hervieu, traduit le malaise et l’inquiétude grandissante des acteurs culturels de Lyon et de la Métropole face aux exigences des élus écologistes qui, sous couvert de bilan carbone et de vérification de l’adéquation de leurs politiques culturelles, nous font craindre une volonté d’intervenir sur les choix artistiques puis de développer un modèle de culture loco-locale avec de moins en moins d’artistes étrangers et donc une perte de notre ouverture au monde ».
Que va-t-il se passer désormais ?
Dans une interview à nos confrères de Lyon-Capitale, Cédric Van Styvendael, maire de Villeurbanne et vice-président chargé de la Culture à la Métropole explique la manière dont les départs annoncés vont être remplacés : “ Nous allons lancer le recrutement pour la direction de la Maison de la danse et de la Biennale en janvier. D’ici là, les affaires courantes seront gérées. Un nouveau président sera désigné en conseil d’administration lorsque les conditions seront réunies, car le lien président/directeur est important. Nous avons déjà pensé à quelqu’un, qui m’a dit qu’il regarderait tout ça avec conscience. En tout cas, il n’y a pas de remise en cause de la feuille de route. Il faut savoir raison garder.”
Gardons donc raison, mais le tournant va devoir être négocié avec nettement plus de doigté, cette fois, si l’on veut que les deux grands événements culturels qui concourrent fortement à l’image de Lyon, en l’occurrence les deux Biennales ne pâtissent pas de ces deux départs quelque peu brusqués…