La situation financière des chefs d’entreprise n’est pas toujours celle que l’on croit…
Les polémiques sur les salaires des patrons du CAC 40 sont récurrentes. Et de s’indigner de leur salaire qui serait excessif. Tout dépend de la valeur ajouté réelle qu’ils apportent à l’entreprise et à cet aune certaines rémunérations ne sont pas usurpées.
Il est en revanche indécent que des patrons qui ont fait plonger le chiffre d’affaires de leur entreprise ou qui n’ont pu résister à une tempête économique s’octroient néanmoins de copieuses hausses de rémunération tout à fait injustifiées. Le vrai scandale se situe en fait là.
Mais ces polémiques cachent une réalité dont on parle rarement : celle des rémunérations moyennes des chefs d’entreprise. Et là, on redescend sur terre !
Les pendules à l’heure
En juin dernier, l’Insee a édité une étude fort intéressante sur le sujet qui a rencontré peu d’échos.
Dommage, car elle est très instructive et remet quelques pendules à l’heure.
Sachez ainsi qu’en France, un chef d’entreprise sur cinq gagne moins de 1 000 euros par mois.
Il existe en effet une grande disparité entre les chefs d’entreprise.
Au bas de l’échelle, ceux qui tirent les statistiques vers le bas sont les auto-entrepreneurs, qui représentent un quart des chefs d’entreprise : ils gagnent en moyenne… 440 euros par mois grâce à leur activité.
On comprend dès lors pourquoi ils ont souvent une double activité (un sur trois, en fait) et cumulent leur auto-entrepreneuriat avec un emploi salarié, leur permettant dans ce cas, selon l’Insee de percevoir 2 090 euros.
3 460 euros en moyenne
Hors ces derniers auto-entrepreneurs, les chefs d’entreprise, en moyenne ne roulent pas sur l’or : ils ont perçu en moyenne 3 460 euros par mois.
Là encore, on note une grande disparité : de 980 euros dans le commerce à 1 870 dans les transports, en passant par 4 240 euros dans les services aux entreprises, à 2 570 euros dans l’industrie.
Mais cette enquête montre que ces rémunérations qui ne sont pourtant pas mirobolantes tendent malgré tout à baisser.
Entre 2012 et 2013, les revenus d’activité en euros constants des chefs d’entreprise ont fortement reculé avec, par exemple, une baisse de près de 5 % pour les auto-entrepreneurs.
Les entrepreneurs individuels « classiques » ont vu leurs revenus diminuer de 1,6 %. Quant aux gérants majoritaires de société, les gains produits par leur activité ont chuté de… 8 %. Il est vrai que pour ces derniers, la baisse s’explique pour plus de la moitié par un repli des dividendes.
Cette baisse de revenus concerne tous les secteurs d’activité – à l’exception du milieu médical qui se maintient difficilement – mais elle affecte particulièrement le domaine des services aux entreprises : services juridiques, conseil en gestion, information et communication, design…
L’Insee s’est intéressé à une autre disparité dans cette enquête, celle de la disparité homme/femme.
Si elle est évidente dans le salariat, elle est aussi incontestable chez les chefs d’entreprise.
Les femmes touchent un quart de moins que les hommes
Première disparité : elles ne sont que 35 % à afficher ce statut. Mais pire encore : elles gagnent en moyenne un quart de moins que leur homologue masculin : soit 2 650 euros.
Une des explications apportées par les enquêteurs de l’Insee : « Elles sont souvent plus jeunes et souvent dirigent des entreprises de petite taille. »
Une bonne nouvelle toutefois : « L’écart entre les hommes et les femmes tend à se réduire au fil des ans… » Ouf !
Bref, lorsqu’on parle des salaires des dirigeants pour s’indigner ou s’en féliciter, ils convient bien de savoir de quoi l’on parle. Et se souvenir que l’échelle entre la rémunération moyenne des chefs d’entreprise français et celle de Carlos Ghosn, l’échelle va de 1 à 2 000…
-Laure Omalek et Sergine Tellier. « Revenus d’activité des non-salariés en 2013. Baisse prononcée dans la plupart des secteurs d’activité ». Juin 2016. INSEE Première, n°1604.
(*) Fixes et variables dus au titre de 2015. Hors avantages en nature. Variables : y compris pluriannuel. Options et actions : valeurs à l’attribution en 2015. Hors contributions aux régimes de retraite (source La Tribune, à partir des rapports des sociétés).