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Verts au pouvoir et monde patronal : guerre larvée en perspective ou virage à venir d’une écologie réaliste ?

Les premières paroles en direction du monde économiques tant de Bruno Bernard, le nouveau président de la Métropole que de Grégory Doucet, le nouveau maire de Lyon, se sont voulues apaisantes.

Bruno Bernard , lors de son arrivée à la présidence, a ainsi assuré devant les élus métropolitains : “ Ensemble nous ferons la démonstration que la transition écologique est compatible avec l’économie, qu’elle est même une opportunité qui redonne du sens à l’économie.”

Avant le premier tour, le même Bruno Bernard avait rencontré les patrons qui comptent à Lyon (Jean-Michel Aulas, Olivier Ginon, Guy Mathiolon…) et poursuivi ses entretiens, « pour rassurer ». Reçu à la CPME, il avait même déjeuné avec une trentaine de promoteurs immobiliers.

Dans le même registre, Grégory Doucet, quant à lui a assuré, sitôt son élection « qu’il ne voulait pas affaiblir l’économie mais nous pensons que le progrès écologique peut en être le moteur », évoquant par exemple des économies en moyenne de 20 000 euros pour les entreprises qui se transformeraient après un bilan thermique.

Premières déclarations apaisantes

En fait ces premières déclarations en forme de douceurs ont été suivies des premiers affichages qui n’ont assurément pas plu aux instances patronales, Grégory Doucet demandant à ce que soient interrompus les travaux de la LGV Lyon-Turin ; défendue bec et ongles par les milieux patronaux.

Un affichage qui ne lui coûte rien, mais qui donne des gages à ses troupes vertes car le maire de Lyon n’a aucune possibilité d’entraver le projet qui est européen, sinon de souffler sur les braises.

D’autres déclarations concernant Lyon-Saint Exupéry et sur la volonté des nouvelles équipes vertes de mettre la pédale douce sur les vols intercontinentaux et plus largement internationaux pour privilégier les visiteurs hexagonaux (à condition qu’ils viennent en train) et européens, n’ont pas été non plus prisées des cénacles patronaux.

Ces derniers ont toujours voulu faire de Lyon-Saint Exupéry le fer de lance de l’économie régionale. Mais là encore, Bruno Bernard ne possède pas les leviers pour agir, depuis la privatisation d’Aéroports de Lyon, ne possédant qu’un strapontin à l’aéroport.

On se souvient que lors de ses grands oraux avant le premier tour avec les principales listes en piste alors, le Medef-Lyon-Rhône n’avait pas volontairement invité le chef de file de la liste verte.

Alors, escarmouches ou annonces d’une guerre larvée ?

Pour l’heure tant la CPME que le Medef Lyon Rhône ne sont pas sortis du bois et attendent de voir comment les Verts vont effectivement gérer Lyon et la Métropole avec leurs alliés PS, PC et Insoumis. A ce propos une autre question se pose également : quel rôle (aiguillon ?) vont jouer ces alliés qui ont permis aux Verts d’obtenir la majoirité dans les deux assemblées.

Quels rapports avec Laurent Wauquiez ?

S’y rajoute une autre question, directement politique : quels vont-être les rapports entre les Verts et la Région détenue par Laurent Wauquiez.

L’on sait que l’accord scellé par Gérard Collomb avec François-Noël Buffet , avant le deuxième tour, “pour faire barrage au péril Vert”, avait bénéficié du feu… vert appuyé de Laurent Wauquiez.

Or, dans son discours d’investiture à la Métropole, Bruno Bernard a annoncé qu’il prendrait « rapidement contact avec le président de la Région pour avancer sur le projet de RER à la lyonnaise et sur la tarification unique entre le SYTRAL et la SNCF ».

Quel accueil le président de la Région va-t-il offrir aux demandes des Verts, alors qu’il peut légitimement craindre la poursuite d’une vague verte à la Région, lors des prochaines élections régionales, en 2021 ?

Nombreuses incertitudes

On le voit beaucoup d’incertitudes planent, ce qui explique que les deux nouvelles têtes de l’exécutif jouent la carte de l’arrivée en douceur.

On peut aussi imaginer que l’arrivée au pouvoir des Verts, certes les amènent à mettre en œuvre leur programme d’une écologie politique plus active, c’est bien le moins, mais aussi moins dogmatique.

Et d’espérer que cette marée verte aura quelques vertus : celle de favoriser l’émergence chez les Verts, avec la pratique du pouvoir, d’une génération d’élus plus responsable que la précédente : celle des pionniers d’une écologie nettement plus radicale, plus sectaire, comme à Grenoble où le maire écologiste, Eric Piolle a d’ailleurs été réélu.

Et que confrontée à la réalité, cette nouvelle génération frottera ses promesses à la réalité en finançant des pistes cyclables sans relever la taxe foncière, ouvrira des forêts urbaines sans exclure l’activité économique, en rénovant les logements sans creuser la dette, etc…

L’arrivée de ces nouveaux visages porteurs d’une écologie à portée de citoyen, parfois issus du monde de l’entreprise comme c’est le cas de Bruno Bernard qui dirigeait une société de désamiantage et actionnaire de plusieurs sociétés, offrirait alors l’opportunité de ne pas réduire la défense de l’environnement à ses éléments les plus radicaux, les plus activistes.

Bref, Lyon et sa Métropole vont-elles constituer le laboratoire d’une écologie réaliste, sans qu’elle trahisse ses idées de fond ?

Tout le pari est là. Les prochains mois s’annoncent passionnants