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Dans un contexte de montée des allergies respiratoires et de pression accrue sur la santé publique, la Métropole de Lyon lance une expérimentation inédite en France : une carte numérique qui permet de calculer des itinéraires en fonction de l’exposition aux pollens. Si la démarche peut sembler anecdotique à première vue, elle soulève en réalité des enjeux profonds pour les acteurs de la smart city, de la mobilité douce et de l’innovation publique.

Une initiative portée par le laboratoire Erasme

À l’origine de ce projet, on retrouve le laboratoire d’innovation Erasme, structure interne de la Métropole de Lyon, qui collabore avec les directions de l’innovation numérique, des mobilités, et les services d’open data locaux. Ensemble, ils ont conçu un outil capable de proposer des trajets optimisés selon l’exposition aux pollens allergisants. Ce service se base sur un ensemble de données croisant les essences d’arbres répertoriées, leurs périodes de floraison et les cartes de voirie piétonne.

L’outil permet à tout usager d’entrer un point de départ et une destination pour calculer un trajet réduisant de 26 à 29 % en moyenne l’exposition aux pollens, selon la saison. Il s’agit d’une première en France à l’échelle métropolitaine, et peut-être d’un levier d’innovation plus large qu’il n’y paraît.

Un service public qui s’adresse aussi aux professionnels

Si la carte s’adresse au grand public, ses implications concernent aussi les acteurs économiques, en particulier ceux positionnés sur les marchés de la mobilité urbaine, de la e-santé, des solutions cartographiques ou des services urbains personnalisés. Cette expérimentation pourrait notamment ouvrir de nouvelles opportunités pour :

  • les startups spécialisées dans l’agrégation de données environnementales,

  • les intégrateurs de solutions cartographiques (SIG, API, applications mobiles),

  • les entreprises développant des solutions d’aide à la mobilité inclusive et sensible aux enjeux sanitaires,

  • ou encore les groupes de conseil spécialisés dans l’accompagnement des collectivités dans leurs démarches d’innovation urbaine.

Une logique de démonstrateur : Lyon se positionne en vitrine

À travers ce service, la Métropole de Lyon renforce sa position de territoire démonstrateur de la ville intelligente, où l’expérimentation devient un mode de gouvernance. L’outil « itinéraires pollens » s’intègre à une plateforme plus large développée par Erasme : Datagora, qui permet déjà de calculer des parcours en fonction de la chaleur, du bruit ou encore des zones touristiques. Fontaines, bancs, toilettes publiques y sont également recensés, renforçant l’utilité concrète de l’outil dans une logique de ville servicielle.

L’expérimentation, prévue jusqu’en septembre, s’inscrit dans une temporalité qui permet une collecte fine de données sur toute la saison pollinique. Un formulaire intégré permettra de recueillir les retours des usagers, dans un processus itératif.

Données ouvertes : vers une économie de la donnée environnementale ?

L’un des aspects les plus stratégiques du projet réside dans l’exploitation des données ouvertes. Le système repose en effet sur plusieurs dizaines de jeux de données publiés sur data.grandlyon.com, notamment sur l’emplacement et les espèces des arbres d’alignement, enrichis par les bases des villes de Lyon et de Rillieux-la-Pape.

L’enjeu pour les entreprises ? Pouvoir réutiliser ces données dans leurs propres services. Le développement de la donnée environnementale comme matière première ouvre des perspectives concrètes : application de suivi santé, plateformes touristiques adaptatives, services de conciergerie urbaine, planification urbaine prédictive…

Lyon devient ici un laboratoire à ciel ouvert de la donnée utile, et non plus seulement ouverte par principe. Une démarche qui pourrait inspirer d’autres métropoles et générer un marché autour de l’exploitation responsable des données publiques.

Santé environnementale : un créneau économique en expansion

Cette initiative s’inscrit aussi dans une tendance de fond en matière de santé environnementale, qui dépasse les seuls enjeux climatiques pour toucher à la qualité de vie quotidienne. L’allergie au pollen est aujourd’hui un problème de santé publique majeur : selon l’ANSES, près de 30 % des adultes et 20 % des enfants seraient concernés.

Pour les entreprises qui conçoivent des produits ou services en lien avec l’urbanisme, le sport-santé, le mobilier urbain, ou les transports doux, le paramètre « santé environnementale » devient un critère de plus en plus présent dans les appels d’offres publics. L’exemple de la carte pollens peut ainsi être vu comme un indice de ce que seront les marchés publics de demain : sensibles, personnalisés, et intégrant une multitude de micro-données liées au bien-être.

Une innovation frugale mais prometteuse

D’un point de vue technique, la solution mise en place par Erasme se distingue par sa sobriété : elle repose essentiellement sur des données déjà disponibles et une modélisation relativement simple en comparaison des projets de smart city plus coûteux.

Et pourtant, l’impact potentiel est fort :

  • pour les citoyens, qui gagnent en autonomie,

  • pour les services publics, qui améliorent la qualité de service sans déployer d’infrastructure lourde,

  • pour les entreprises, qui peuvent y puiser inspiration, données, ou même s’associer à des futurs projets de co-développement.

Cette logique d’innovation frugale, soutenue par les principes de la Fabrique de la donnée publique, semble cohérente avec les nouvelles attentes des collectivités face aux contraintes budgétaires.

Quelle suite pour l’expérimentation ?

L’expérimentation durera jusqu’en septembre 2025. En fonction des retours d’usagers et de l’analyse des données d’utilisation, la Métropole pourrait décider de pérenniser et d’enrichir l’outil. Parmi les pistes évoquées : intégration des conditions météo en temps réel, amélioration des algorithmes de calcul, ou même ouverture aux cyclistes via les itinéraires modes doux.

Mais le véritable enjeu se joue peut-être ailleurs : ce type de projet pose les bases d’un nouveau dialogue entre collectivités, entreprises innovantes et citoyens. Il y a fort à parier que les entreprises positionnées sur la donnée, la santé, ou les services urbains seront incitées à participer à cette dynamique, via des marchés publics, des projets en open innovation ou des appels à projets métropolitains.