Crise agricole dans l’Ain : entre défis économiques, santé animale et renouvellement des générations
Les agriculteurs de l’Ain vivent une période particulièrement éprouvante, confrontés à une succession de crises qui mettent à rude épreuve leur activité et leur avenir. Lors de la conférence agricole départementale 2026, organisée à Tossiat le 14 novembre, les acteurs du secteur ont fait le point sur une année marquée par des défis sans précédent. Si l’on veut comprendre les enjeux actuels, il faut plonger au cœur des difficultés économiques, sanitaires et sociales qui secouent cette filière stratégique pour le département.
Une économie agricole sous pression : la rémunération en ligne de mire
Le secteur de l’élevage, pilier de l’économie agricole de l’Ain, subit une forte érosion de ses marges. La hausse des coûts de production — alimentation, énergie, matériel — ne trouve pas toujours de compensation suffisante via les prix de vente. Résultat : nombreux sont les exploitants à voir leur rentabilité diminuer, ce qui fragilise leur capacité à rémunérer salariés et propriétaires. La situation est telle que certains agriculteurs évoquent une réelle difficulté à maintenir leur équipe, leur santé financière et leur équilibre personnel.
Un agriculteur témoigne : « Je vois mes salariés s’épuiser physiquement sur l’exploitation, et pourtant, ils sont faiblement rémunérés. » Ce constat n’est pas isolé, il reflète une réalité préoccupante : l’agriculture aindinoise peine à attirer et retenir de jeunes talents, déjà confrontés à un métier exigeant, souvent perçu comme peu rémunérateur. La question du revenu est devenue centrale, car sans un juste retour, comment assurer la relève ?
Les défis sanitaires : la dermatose nodulaire bovine, un nouveau coup dur
La dermatose nodulaire bovine, maladie infectieuse qui touche la peau des bovins, a fait son apparition dans le département cet été, avec trois foyers recensés. Classée en zone réglementée, cette maladie entraîne des pertes économiques importantes, notamment par l’abattage d’animaux affectés, ce qui déséquilibre davantage la rentabilité des élevages.
Ce nouveau défi sanitaire s’ajoute aux coûts déjà élevés liés à la lutte contre d’autres maladies ou à la gestion quotidienne des exploitations. La présence de cette pathologie menace la stabilité de la filière, tout en accentuant la pression sur les éleveurs déjà fragilisés par l’environnement économique difficile.
Une jeunesse peu séduite par le métier : l’urgence du renouvellement
Le vieillissement du corps social agricole est un sujet préoccupant. Plus de la moitié des agriculteurs ont plus de 50 ans, et l’âge moyen à l’installation atteint aujourd’hui 30 ans. La difficulté à attirer de jeunes générations s’accompagne d’un problème de transmission. La majorité des exploitations restent dans la famille, mais le nombre d’installations nouvelles, bien qu’en hausse, reste insuffisant pour assurer la pérennité du secteur.
Un participant à la conférence souligne : « Le métier devient aussi de plus en plus complexe », évoquant la nécessité d’une adaptation constante face à un environnement évolutif. La lourdeur administrative, la réglementation en perpétuelle mutation, et la nécessité d’intégrer des technologies innovantes comme la robotique ou la génétique complexifient encore le parcours de ceux qui souhaitent s’installer.
Les obstacles à l’installation : entre mythes et réalité
Le parcours à l’installation reste semé d’embûches, malgré des efforts pour encourager la relève. En 2024, 54 nouvelles installations ont été soutenues par le dispositif d’aide à l’installation, témoignant d’une dynamique encore fragile mais présente. La chambre d’agriculture de l’Ain a aussi organisé un point d’accueil destiné à informer et accompagner les porteurs de projets, qui a accueilli 450 personnes.
Un point essentiel est la nécessité de déconstruire certains clichés sur le métier. Un participant insiste : « L’agriculture, c’est aussi la robotique, le GPS et la génétique. Nous sommes loin des clichés d’un secteur figé dans le passé. » La modernisation et l’innovation doivent devenir la norme pour attirer des jeunes et rendre le métier plus attractif, en phase avec les enjeux du XXIe siècle.
Le soutien du Département : un engagement fort pour préserver l’avenir
Face à ces multiples défis, le Département de l’Ain a réaffirmé son soutien financier pour accompagner la filière dans ses efforts. Lors de la conférence, Jean-Yves Flochon, vice-président délégué à l’agriculture, a insisté sur la nécessité de maintenir un tissu agricole résilient. Pour lui, il s’agit de bâtir une agriculture capable de faire face aux crises, qu’elles soient sanitaires ou climatiques.
Gilles Brenon, président de la chambre d’agriculture locale, a lui aussi souligné que l’unité de la profession, combinée à une stratégie d’attractivité et d’adaptation, constitue la clé pour assurer la pérennité du secteur. La mobilisation collective, la formation continue et la capacité à innover sont des axes prioritaires pour 2026.
Des stratégies pour faire face et préparer l’avenir
Les mesures évoquées lors de la conférence visent à renforcer la résilience de l’agriculture ainodine. Parmi celles-ci :
- Favoriser la transmission et l’installation de jeunes agriculteurs via des dispositifs d’aide adaptés.
- Développer la formation et la sensibilisation aux nouvelles technologies agricoles.
- Améliorer la gestion sanitaire pour limiter l’impact des maladies comme la dermatose nodulaire bovine.
- Renforcer la solidarité et l’unité de la profession pour mieux affronter ensemble les crises.
Ce plan d’action doit permettre au secteur agricole de se moderniser, de mieux résister aux chocs et de donner envie à la nouvelle génération de s’engager dans cette voie, souvent perçue comme un métier d’avenir, malgré ses nombreux défis.
À l’image de cette région, l’agriculture dans l’Ain doit continuer à évoluer pour conjuguer tradition et innovation, tout en assurant un avenir durable pour ses exploitants et leur territoire.
![Lyon Entreprises [LE]](https://www.lyon-entreprises.com/wp-content/uploads/2024/05/cropped-logo-le-nm-260x100-noir.png)