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À Caluire-et-Cuire, la Maison Sainte-Claire inaugure une nouvelle forme d’habitat inclusif, destinée aux adultes sourds avec handicaps associés. Ce projet, porté par l’association IRSAM et soutenu financièrement par la Métropole de Lyon, illustre une volonté croissante de repenser l’accompagnement des personnes en situation de handicap en dehors du cadre institutionnel classique.

Un projet à taille humaine au cœur d’un quartier

La résidence de la Maison Sainte-Claire accueille 12 adultes locataires de leur propre logement au sein d’un immeuble de droit commun, qui comprend au total 20 appartements. Conçu comme un espace partagé et accessible, ce lieu favorise la vie autonome tout en prévenant l’isolement social. Chaque habitant dispose d’un appartement individuel de type T1 ou T2, avec la possibilité de participer à des temps collectifs dans le cadre d’un projet de vie sociale et partagée animé par un coordinateur dédié.

L’initiative s’inscrit dans le cadre de l’Aide à la Vie Partagée (AVP), un dispositif soutenu par la Métropole, visant à proposer des alternatives aux structures médico-sociales traditionnelles. Avec 38 projets d’habitat inclusif sur le territoire métropolitain, dont 21 déjà opérationnels, la collectivité affirme une stratégie proactive en matière d’inclusion.

Un partenariat public-associatif structurant

Le projet de la Maison Sainte-Claire repose sur une coopération entre plusieurs acteurs. L’association IRSAM, reconnue pour son expertise dans l’accompagnement des personnes en situation de handicap sensoriel, est le porteur du projet social. La construction a été menée par « Entreprendre pour Humaniser la Dépendance », tandis que l’organisation Habitat et Humanisme Soin accompagne les personnes âgées présentes dans les autres logements de l’immeuble.

Cette cohabitation intergénérationnelle, bien que peu fréquente dans les projets d’habitat inclusif, renforce les dynamiques de lien social. Les espaces communs, pensés pour être conviviaux, sont propices aux échanges entre les différents locataires, qu’ils soient en situation de handicap ou non.

Un financement public significatif

Pour la seule Maison Sainte-Claire, la Métropole de Lyon a mobilisé 288 000 € au titre des aides à la pierre pour la construction, et verse chaque année 60 000 € à l’IRSAM pour le fonctionnement de l’AVP. Ce soutien permet notamment d’assurer la présence d’un animateur-coordinateur, garant du lien social et du soutien à l’autonomie des habitants.

Il est à noter que la Métropole a augmenté de 21,7 % le budget consacré aux personnes en situation de handicap et aux personnes âgées depuis le début du mandat, soit une enveloppe supplémentaire de 80 millions d’euros. Ce chiffre, bien qu’annoncé comme ambitieux, mérite d’être interrogé au regard des besoins croissants de la population concernée et des délais souvent longs de mise en œuvre des projets.

IRSAM : une expertise reconnue dans l’accompagnement sensoriel

Implantée historiquement à Marseille, l’association IRSAM développe depuis plusieurs années ses activités en région lyonnaise. Elle intervient auprès de publics sourds, malentendants, aveugles ou malvoyants, enfants comme adultes. La Maison Sainte-Claire constitue sa première initiative d’habitat inclusif dans la métropole.

Ce projet valorise la langue des signes, l’accessibilité universelle et l’autodétermination des personnes accompagnées. L’approche défendue par IRSAM repose sur la participation active des résidents à leur projet de vie, dans une logique de co-construction et d’autonomisation progressive. L’association affirme également un ancrage local fort, cherchant à tisser des liens durables entre les habitants et leur environnement immédiat.

Vers une nouvelle norme d’inclusion ?

L’ouverture de la Maison Sainte-Claire soulève une question essentielle : peut-on faire de ce type de dispositif une norme pour l’habitat des personnes en situation de handicap ? Si l’intention est saluée, plusieurs enjeux demeurent. Le premier est celui de l’échelle : avec 12 logements, ce projet reste limité en capacité d’accueil. Le second est celui du modèle économique : bien que soutenu par les pouvoirs publics, il repose sur des montages partenariaux complexes et des financements récurrents difficiles à garantir dans le temps.

Autre point à considérer : l’articulation avec les autres politiques publiques, notamment celles du logement social et de l’accompagnement médico-social. Ces projets nécessitent une coordination fine entre collectivités, opérateurs du logement, associations spécialisées et services de santé. Une gouvernance claire et partagée reste essentielle pour assurer la pérennité de tels dispositifs.

Un territoire engagé mais encore en construction

La région lyonnaise affiche une ambition forte en matière d’inclusion et de diversification des réponses à la dépendance. Le développement des habitats inclusifs en témoigne. Cependant, malgré une volonté politique affichée et des financements en hausse, le passage à une logique de droit commun pour les publics vulnérables demande un changement structurel profond. Formation des acteurs, adaptation du bâti, reconnaissance des métiers d’accompagnement : autant de chantiers à poursuivre.

En ce sens, la Maison Sainte-Claire apparaît comme un laboratoire d’innovation sociale, dont les enseignements devront être analysés et diffusés. Le suivi de l’impact sur les habitants, à moyen et long terme, permettra d’évaluer la réelle capacité de ces dispositifs à répondre aux attentes d’inclusion, d’autonomie et de qualité de vie.